La crise ne cesse de susciter des prévisions de plus en plus catastrophiques : en France, comme dans la plupart des pays, la récession s’installe, les recettes fiscales s’effondrent, les plans d’aides de succèdent et le chômage, partiel et réel, augmente dans des proportions vertigineuses. Au-delà des mesures d’urgence, le débat sur le « monde d’après » fait rage. Qui paiera la dette de la crise ? Telle est la principale question posée.
Cette crise est présentée comme la plus grave depuis celle de 1929. Ceci veut dire qu’elle serait plus grave que la crise de 2008, qui a pourtant engendré des politiques d’austérité qui ont plombé le pouvoir d’achat, aggravé la précarité et fragilisé l’action publique. Une nouvelle vague d’austérité à l’échelle mondiale provoquerait un véritable tsunami social, écologique et économique. Les déclarations des responsables politiques et des économistes visant à dire qu’il faudra payer la dette de cette crise et qui s’opposent à des voies alternatives (réforme fiscale, mutualisation des intérêts d’une dette qui serait transformée en « dette perpétuelle », etc) font cependant craindre ce scénario, par ailleurs parfaitement conforme aux intérêts financiers et aux thèses néolibérales.
Face aux tenants d’une austérité brutale, de nombreuses voix se font entendre sur l’absolue nécessité de changer d’orientation. La justice fiscale notamment effectue un retour en force dans le débat public.
Dans une tribune du 22 avril dernier, Sophie Lemaitre prône la justice fiscale et sociale et dénonce le coût de l’évasion fiscale alors que mieux la combattre dégagerait des ressources essentielles à l’action publique. Une autre tribune collective, publiée le 8 avril et signée notamment par Thomas Piketty, appelle à un contrat social et fiscal plus juste. C’est aussi ce que porte Gabriel Zucman qui dénonce une politique fiscale menée en faveur des ultra-riches. La plateforme Paradis fiscaux et judiciaires se fait également entendre en portant ses propositions. L’association Attac avec laquelle notre organisation travaille de longue date, notamment dans la période, a livré ses propositions d’urgence et mène également une campagne d’interpellation des députés pour l’adoption de mesures de justice fiscale. Solidaires Finances Publiques s’exprime bien évidemment : notre proposition de contribution sur le patrimoine des plus aisés notamment étant reprise.
Solidaires Finances Publiques n’a pas attendu la crise pour définir ses propositions. La justice fiscale et sociale telle que nous la concevons rééquilibrerait le système fiscal au profit des impôts directs, le rendant ainsi plus progressif, neutraliserait la concurrence fiscale, procéderait à une harmonisation fiscale européenne et instaurerait une nouvelle gouvernance fiscale et financière mondiale.
Elle s’engagerait donc en posant d’emblée plusieurs mesures fortes, en France comme au plan supranational : imposition des revenus financiers (dividendes, revenus d’obligations, plus-values) au barème progressif, celui-ci étant relevé, contribution sur le patrimoine des plus aisés, réforme de l’impôt sur les sociétés pour intégrer la dimension numérique, contribution sur les bénéfices des multinationales, revue des niches fiscales pour élargir l’assiette des impôts concernés, refonte des bases de la fiscalité locale, taxe sur les transactions financières imposant le trading à haute fréquence, taxation unitaire au stade des multinationales, instauration d’un serpent fiscal européen, renforcement de la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales.
En s’engageant sur cette voie, ce ne sont pas seulement des dizaines de milliards d’euros qui seraient dégagés pour l’action publique. Les inégalités seraient également réduites et le consentement à l’impôt serait renforcé. La justice fiscale et sociale est donc un enjeu global, un choix de société.