Nous avons appris leur création par l'indiscrétion toute relative d'un journaliste d'Acteurs Publics. La DG que nous avons interpellée a tenu à justifier son choix par un message à tous les syndicats. Il ne manque pas de sel. Si la décision de la centrale s'appuie sur la reconnaissance d'une situation que traduisent très concrétement et depuis plusieurs années les baromètres sociaux, les objectifs poursuivis s'écartent encore un peu plus d'une prise en charge des causes qui provoquent le mal-être des personnels.
Nous annoncer la création de cellules d'écoute supplémentaires alors que d'autres existent déjà, c'est reconnaître implicitement l'ampleur du malaise tout autant que l'incapacité des entités existantes à l'endiguer.
Qu'en sera-t-il des nouvelles ?
On ose nous écrire que la finalité est d'offrir "des états statistiques mensuels et un bilan annuel" en vue d'identifier "de nouveaux leviers d'amélioration".
Une vision enarchique fonctionnelle et a-humaine, alors que la problématique individuelle, psychologique et sociétale devrait occuper le centre. Nul doute que l'on puisse établir un tableau statistique en couleur des burn-outs et des suicides, en les complétant de fromages mal odorants permettant d'approcher le pourcentage respectif des causes personnelles et professionnelles supposées.
On bafouera ainsi, outre la dignité due à la personne, le principe élémentaire selon lequel chaque individu est unique et réagit au regard de son vécu spécifique. On rejoindra aussi une logique de camelot qui fera entrer chaque agent dans une case prédéfinie, niant là encore la notion même de sujet. Enfin et surtout, au travers des pathologies supposées, on définira en contre-champ une normalité supposée.
En un mot, c'est une démarche totalitaire qui nous guette, d'autant que personne ne pourra sérieusement nous assurer de la confidentialité des entretiens.
Enfin reste posé le problème des encadrants, pour lesquels des cellules seront dédiées aux "problématiques managériales". Là encore la sémantique souligne, s'il en était besoin, que la finalité est le rendement et non la personne.
Ces cellules excluent-elles de fait que ces cadres puissent eux-mêmes bénéficier de soutien en dehors de ces problématiques ? Ou le cadre est-il lui même supposé toujours bien aller, la situation inverse impliquant ipso facto qu'il est un mauvais cadre ? Qu'en sera-t-il par ailleurs, juridiquement et juridictionnellement, du cadre à qui aura échappé un danger grave et imminent pas toujours identifiable ?
Quant à la forme, comment sérieusement penser que des problèmes majeurs peuvent se régler par téléphone et, parfois, sans un long et patient suivi ? C'est une vision purement technocratique qui nous est opposée, et qui n'est peut-être pas si éloignée que cela de ces sites informatiques où l'on peut se donner l'illusion d'acheter ponctuellement de l'amour !
Tout cela n'est qu'un miroir aux alouettes qui manifeste en amont l'impuissance de notre administration à gérer la souffrance au travail, en aval sa volonté de se dédouaner au travers de la mise en place d'une "boîte à outils", selon le langage humanoïde consacré.
Tant que l'administration n'admettra pas que ses méthodes de travail, que ses réformes incessantes, que l'instabilité et la précarisation permanente sont la cause des maux des agent-e-s, alors ils continueront à souffrir.
Vos représentants au CHS-CT ministériel ont dénoncé avec virulence ce procédé.