C’est dans un contexte particulier que se tient ce GT protection des agents. En effet les nombreuses dégradations opérées sur des sites de la DGFiP démontrent clairement une volonté de s’en prendre aux services de l’État, notamment aux services en charge d’asseoir et de recouvrer l’impôt.
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En effet les nombreuses dégradations opérées sur des sites de la DGFiP démontrent clairement une volonté de s’en prendre aux services de l’État, notamment aux services en charge d’asseoir et de recouvrer l’impôt. De manière sous-jacente, ressurgissent les questions du consentement à l’impôt de la justice fiscale et sociale, et de la redistribution des richesses. Ces évènements conjugués à la multiplication des agressions physiques et/ou verbales plongent les agents dans une très forte détresse morale et les obligent à remplir leurs missions dans un climat anxiogène insupportable.
A ces circonstances extérieures viennent s’ajouter des gestions internes catastrophiques liées bien entendu aux suppressions d’emplois et autres restructurations, mais aussi à la mise en place d’outils non aboutis (tel GMBI)
Ils démontrent également l’urgence à mettre en place de véritables mesures de prévention et une politique d’accompagnement et de soutien à la hauteur de leurs attentes.
L’odieux assassinat perpétré sur notre collègue et les violences qui l’ont accompagné ont servi de détonateur et obligé la DGFiP à sortir du déni dans lequel elle s’est enfermée depuis de trop nombreuses années, et ce malgré les alertes sans cesse renouvelées des agents et des représentants des personnels. Tous les outils de recensement des risques psychosociaux mis en place par l’administration dressent un bilan alarmant et mettent en exergue une infime partie des violences verbales et/ou physiques subies au quotidien par les agents.
Face à l’horreur, si l’écoute semble s’être libérée, espérons que la parole des agents et des agentes soit enfin entendue.
Quand il devient impossible de fermer les yeux et les oreilles, la seule alternative possible est de faire face et de prendre les mesures qui s’imposent.
C’est bien dans cet état d’esprit et sans équivoque que Solidaires Finances Publiques s’est inscrit dans ce cycle de discussions et de réflexions en participant aux GT mis en place par la Direction Générale, et en souhaitant que la question de la protection des agents soit discutée dans son entièreté. Notre démarche s’inscrit dans le respect des personnels et des missions.
De son côté, l’Etat-employeur a l’obligation de veiller à la santé et à la sécurité de ses agents et de ses agentes en mettant en place des actions de prévention, d’information et de formation. Il doit également évaluer les risques professionnels sur chaque poste de travail. Aussi, les questions budgétaires ne doivent en aucun cas constituer un frein à la mise en place de mesures de protection.
Sept mois après le drame de Bullecourt, se tient aujourd’hui une réunion au cours de laquelle sera présentée « une synthèse des mesures envisagées à l’issue des réflexions engagées depuis le 7 décembre 2022 ».
D’un GT annoncé comme conclusif et de présentation d’arbitrages effectués par la Direction Générale, nous en sommes arrivés finalement :
- 1 à la présentation d’une synthèse des mesures envisagées…
- et 2 à une liste de travaux recensés dès le 6 février 2023 et à ce jour toujours pas commencés. Ainsi en est-il des consultations avec les autres administrations en charge de contrôle ou de la question du TAJ.
Même les mesures concrètes annoncées par Gabriel Attal le 23 mars dernier semblent souffrir d’un problème à l’allumage, ou du moins d’un sérieux contretemps.
Autrement dit, la question de la protection des agents est loin d’être résolue...et les éléments présentés ce jour demeurent largement insuffisants voire totalement perfectibles. En définitive, vous nous présentez une ébauche de mesures dont la plupart restent à écrire ou à mettre en place.
Pour Solidaires Finances Publiques, il est inadmissible de vous voir ergoter sur des mesures simples à mettre en place (cf la mise à disposition de véhicules) ou pire de ne pas respecter les guides que vous écrivez (cf guide sur l ‘organisation des accueils).
Pour Solidaires Finances Publiques, ce GT ne peut-être conclusif en raison de l’ampleur des travaux à mener, du retard qu’ils ont pris, mais aussi au regard d’un ordre du jour pléthorique. La protection fonctionnelle des agents et des agentes justifie à elle seule une séance de travail et doit être examinée sous tous ses aspects. Quant à la procédure d’anonymisation, elle n’a été abordée que de manière fugace.
Si à la première lecture, les documents fournis semblent complets, une lecture approfondie révèle une utilisation abusive d’adverbes de temps ou de verbes conjugués au conditionnel. Comment est-ce possible alors que nous sommes plus de 6 mois après ce terrible drame et que nous avons déjà travaillé pendant 3 GT ! Assez de synthèses, il faut à présent avancer concrètement.
Certes, l’ampleur des travaux est conséquente et se trouve parfois contrainte par le timing législatif. Pour autant, une première note et/ou message clair aurait pu acter le principe de tolérance zéro et inviter explicitement les agents et chefs de service à utiliser les fiches de signalement existantes. Un nouvel outil peut apporter un plus mais ne résoudra pas les réticences locales à rédiger des fiches de signalement. A ce jour, les représentants des personnels continuent de se battre pour voir exister ou traiter des fiches de signalement.
Par ailleurs, la lecture du rapport d’enquête de la délégation de la Formation Spécialisée du Pas-de-Calais, effectué après le meurtre de Bullecourt, est intéressante à plus d’un titre. Elle met en effet en relief le rôle important de la médecine de prévention et souligne les manquements de l’administration dans son obligation légale à mettre en place des visites médicales, les carences en matière de formation, l’absence de tutorat des nouveaux agents….
En conclusion pour Solidaires Finances Publiques, la protection et la sécurité des agents sont des sujets sur lesquels il faut constamment avancer et améliorer.
Ce sont également des mesures concrètes qui impactent nécessairement les missions mais sans les remettre en cause. Aussi il convient à ce titre d’inscrire dans chacun des GT métiers un point à l’ordre du jour relatif à la mise en application des mesures prises et leur déclinaison concrète.
Compte-rendu
Ce 4e groupe de travail se voulait être une synthèse des mesures envisagées à l’issue du cycle de discussions entre l’administration et les représentant-es du personnel. Cette phrase en exergue des documents résumait à elle-même l’essentiel de nos débats. Refaire, à nouveau, le résumé de ce que nous avions dit précédemment, sans acter beaucoup plus de concrétisations, en tous cas, trop peu à notre goût.
En introduction, le directeur général adjoint nous a fait part de l’avancée des travaux en matière de protection des agents et des agentes :
- la mesure juridique est finalisée et sera présentée lors du prochain projet de loi de Finances. Elle concerne d’une part la possibilité que la vérification puisse se dérouler dans les locaux de l’administration à la demande du ou de la vérificatrice et du ou de la cheffe de brigade, et d’autre part un assouplissement des règles de décisions d’anonymisation dans les procédures écrites pour permettre son déploiement plus rapidement ;
- une note de cadrage des nouvelles mesures est en cours de finalisation, elle remettra à jour la circulaire de 2013 concernant la protection et la sécurité des agent-es. Y figurera le nouveau modèle d’avis de vérification. Le projet sera envoyé la semaine prochaine aux organisations syndicales pour commentaires et améliorations. La diffusion de ce document est prévue pour la rentrée avec la proposition, sur demande des organisations syndicales, d’un dispositif permettant son appropriation.
- concernant les équipements : la première série de commandes de voitures est en cours avec l’objectif d’une première livraison d’une centaine de véhicules avant la fin de l’année, d’autres arriveront en 2024. Le recensement a permis d’identifier le besoin d’environ 500 véhicules dans tout le réseau. Dans la mesure où ce sont uniquement des véhicules électriques, l’équipement des directions en bornes de recharge est également prévu. Le DGA a tenu à préciser qu’il s’agissait de véhicules de service et non de fonction et que si les règles d’emprunt pourront être assouplies, les directions locales veilleront à ce qu’il n’y ait pas de dérive de la part des agents et des agentes ! (si, si !). Par ailleurs, le recensement des besoins en gilets pare-balles est en cours auprès des directions locales, ils seront à morphologie adaptée. Enfin, 5 000 smartphones arriveront dans les services pour équiper celles et ceux qui ne le sont pas encore ;
- un nouvel outil numérique de signalement est en cours d’élaboration, afin de faciliter l’utilisation des fiches de signalement, de fluidifier la prise en charge, et de permettre de suivre le traitement des signalements et les réponses apportées. Par ailleurs, le principe de la tolérance 0 face aux agressions et autres incivilités a été rappelé.
Concernant ces premiers arbitrages rendus, Solidaires Finances Publiques se félicite que ses propositions aient été entendues. Ainsi en est-il de la modification de l’article L13 du LPF afin de laisser la possibilité au vérificateur ou à la vérificatrice de pouvoir demander à exercer les opérations de contrôle dans les locaux de l’administration. Nous insistons sur la nécessité de pouvoir les réaliser dans les locaux de la DGFiP, idéalement sur le lieu de la brigade ou dans un Centre des Finances Publiques. Cette faculté offerte ne doit en aucun cas devenir la norme et nuire à la mission de contrôle fiscal externe.
L’inscription dans la loi de l’assouplissement de la mise en œuvre de la procédure d’anonymisation peut aussi constituer une avancée et dépendra de la nouvelle rédaction de l’art L286B du LPF, nous serons vigilants et vigilantes à son application dans les services.
Nous avons, à nouveau, émis des réserves sur le type de véhicules achetés qui ne correspond pas aux besoins locaux.
Si les exigences écologiques nécessitent de privilégier l’utilisation de véhicules électriques, sur le terrain, nous sommes face au manque d’infrastructures de rechargement des véhicules dans de nombreuses régions et zones rurales avec pour conséquence le risque de panne et donc des agents et des agentes qui ne se servent pas de ces véhicules. Dans cette situation, pourquoi ne pas plutôt avoir recours à de la location longue durée de véhicules ? En outre, nous avons relevé, à nouveau, la défiance de la direction vis-à-vis des agents et des agentes qui pourraient profiter des véhicules pour leur usage personnel. Si la DG accède à notre demande d’assouplir les règles de gestion des véhicules, avec la possibilité pour les personnels nomades de venir les chercher la veille et de les rapporter le lendemain d’une mission, Solidaires Finances Publiques demande du pragmatisme sur le sujet et qu’un message clair en ce sens soit adressé aux directions locales.
Au sujet du nouvel outil de signalement : nous ne partageons pas le constat de l’administration pour qui le principal problème réside dans la méconnaissance des fiches de signalement par les agents et les agentes. Pour Solidaires Finances Publiques, trop souvent les personnels de la DGFiP sont dissuadés de déposer un signalement, les évènements vécus : agressions, violences verbales, comportement inappropriés, sont minimisés ; il subsiste une crainte de représailles ou la peur de voir remises en cause les qualités professionnelles de l’agent. Quand elles sont déposées, les fiches de signalement ne sont pas toujours traitées rapidement, une suite n’est pas à chaque fois apportée. Il faut donc, dans chaque service, appliquer une tolérance 0. Si ce nouvel outil numérique peut permettre une meilleure prise en charge et un meilleur suivi des signalements, il est indispensable que la DGFiP change de philosophie, forme les encadrants, soit réactive et donne systématiquement une réponse et une suite à toute fiche de signalement déposée, qu’elle le soit par voie dématérialisée ou papier. Par ailleurs, les représentants et représentantes du personnel doivent être associés.
Enfin nous insistons pour que la note récapitulant ces arbitrages soit discutée dans chaque service pour une réelle appropriation. L’exemple de la circulaire de 2013, très peu connue des agents et des agentes, illustre l’impératif d’avoir un temps d’assimilation des nouvelles mesures permettant de passer du papier à la réalité.
A part ces quelques annonces, le groupe de travail a consisté à commenter des débats que nous avions déjà eus. Solidaires Finances Publiques a fait part de sa grande déception face au peu de mesures concrètes plus de 8 mois après le début des discussions. Notre syndicat a notamment pointé les difficultés de la DG à mobiliser l’exploitation du renseignement interne entre les différents services sur l’ensemble de la chaîne de travail. Nous déplorons également qu’à ce jour, de nombreux points n’aient pas fait l’état d’un arbitrage et que trop de propositions restent à expertiser, à envisager, à réfléchir.
Ainsi en est-il de la possibilité de consulter le fichier des antécédents judiciaire (TAJ), point qui sera à l’ordre du jour de la prochaine rencontre entre notre ministère et celui de l’Intérieur.
A propos des agents et des agentes exerçant des missions d’accueil, la nécessité de mieux les sécuriser avec une meilleure signalétique, un aménagement de l’accueil, des vigiles ou de la vidéo-surveillance a de nouveau été évoquée. Solidaires Finances Publiques a rappelé son attachement à conserver des missions d’accueil avec un nombre suffisant d’agents et d’agentes sur les sites pour permettre un accueil des usagers et des usagères dans les meilleures conditions. Si la vidéo-surveillance peut être un outil, elle doit s’accompagner d'une garantie absolue que les enregistrements ne soient utilisés qu’en cas d’agression. D’autre part, nous avons soulevé les grandes incohérences entre le guide d’aménagement (cf le Référentiel de la Sûreté Immobilière rédigé par la DGFiP !) des halls d’accueil, qui préconise une séparation entre l’espace d’accueil et la zone administrative, et la réalité dans les services où dans de nombreuses situations, les contribuables entrés par la porte du public se retrouvent à devoir sortir par une porte de service.
Alors que l’administration met en avant le besoin de circulation des informations entre les différents services, nous avons rappelé la réalité des services où la casse des chaînes de travail, le management par la statistique, la pression des indicateurs depuis des années empêchent toute mutualisation, et freinent les échanges entre collègues de différents services.
Quant aux mesures spécifiques pour les huissiers, là aussi, rien d’effectif. La faisabilité de nouvelles fonctionnalités dans l’application Thémis est encore à l’expertise, tout comme l’enrichissement des outils avec la fourniture d’un mobile permettant le paiement via carte bancaire ou la possibilité de posséder un badge Vigik pour avoir accès aux cages d’escaliers dans les immeubles.
Nous avons exigé que ce groupe de travail ne soit pas le dernier et qu’un comité de suivi des mesures mises en œuvre soit mis en place. Le DGA a répondu favorablement en proposant un suivi régulier avec des réunions semestrielles ou trimestrielles dont le format reste à définir. Il s’agira de partager deux types d’axes de travaux : le suivi collectif des nouvelles mesures et l’identification de nouvelles difficultés rencontrées.
Pour Solidaires Finances Publiques, la protection et la sécurité des personnels sont un sujet transverse, tout comme les conditions de travail, et doivent être prises en compte dans le cadre des réorganisations de service et l’exercice des missions.
A noter que le sujet de la protection fonctionnelle qui devait être abordé fera l’objet d’un prochain GT.