Olivier Dussopt ministre délégué aux comptes publics est intervenu dans le journal des Echos le jeudi 20 janvier et le vendredi 21 dans le Parisien. Sans surprises, ces deux interviews sont un satisfecit implicite sur la politique fiscale menée au cours du quinquennat et une projection sur l'après élection présidentielle.
Le satisfecit du ministre délégué concerne la croissance de 2021 qui est finalement plus importante que les 6,7% attendus par l'INSEE entraînant ainsi plus de recettes fiscales : plus de 20 milliards par rapport aux prévisions.
Ce ne sont pas les revenus supplémentaires pour les ménages qui sont significatifs (1,6 milliards € pour l'Impôt sur le Revenu et le Prélèvement Forfaitaire Unique sur les revenus du capital), mais la consommation avec 3,6 milliards au titre de la TVA, et surtout l'Impôt sur les Sociétés 10 milliards € et la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques : 7 milliards par rapport à 2019. Les comptes de la Sécurité Sociale bénéficient également de cette embellie, avec un déficit moindre.
Et les grands gagnants sont…
C’est à juste titre que l’État a soutenu l'économie et les professionnels afin de les aider à traverser cette crise, ainsi qu’une grande partie des salarié.es avec l'activité partielle.
Mais après près de deux ans de crise sanitaire, ce sont les entreprises les grandes gagnantes de la loterie, avec les aides, les prêts, la baisse des impôts de production en 2021, l'abandon de charges, etc. Rappelons que l'ensemble des aides aux entreprises n'est pas soumis à imposition, ce qui pour certains secteurs est particulièrement avantageux, la restauration rapide par exemple… Selon le ministre délégué, le coût total des aides publiques pour 2020-2021 et début 2022 s’élève à plus de 140 milliards d’euros.
Ne surtout rien changer
Pour Olivier Dussopt, ces bons résultats économiques sont la preuve qu’il faut continuer voire accentuer la politique actuelle, et propose donc de poursuivre les baisses d'impôt afin de favoriser la compétitivité et la réindustrialisation. Comment ? Comme d’habitude, en supprimant toujours plus de fonctionnaires qui pour lui est l’alpha et l’oméga de la maîtrise des dépenses publiques tout en rendant « les services publics plus efficaces » entendez-par là toujours moins nombreux sur le territoire et toujours plus externalisé vers le privé. Tout le contraire des attentes de l’ensemble des citoyens et citoyennes qui demandent plus de services publics, plus de proximité.
Les fonctionnaires apprécieront, au ministère de l'économie en particulier, en bons élèves ils subissent des suppressions d'emplois depuis plus de 20 ans et … des réformes, et des transferts de missions vers le secteur privé...Alors on continue cette politique destructrice ?
L'autre pan des dépenses publiques, non abordé au cours de cette interview par le ministre, mais par le président de la République avec cette formule devenue célèbre « cela coûte un pognon de dingue », les aides sociales versées. Mais là encore, il s'avère que tous les ans 10 milliards € ne sont pas réclamés. Les raisons avancées seraient la méconnaissance, la complexité, l'éloignement du service public, l'illectronisme, etc...
Sans véritable contrôle, la fraude aux aides publiques explose
Au vu des chiffres, le ministre délégué est bien obligé de parler de la fraude aux aides publiques même si tout au long de l’interview au Parisien, il essaye de la minimiser. Mais les chiffres sont têtus et c’est donc la somme de 174,2 millions d’euros qui est avancée concernant la fraude volontaire ou pas. Et ce montant n’est le résultat que des contrôles engagés dès 2020 sur la base de 8000 dossiers détectés avec comme unique critère un montant d'aides versées supérieur au Chiffre d'Affaires déclaré l'année précédente. Nous sommes donc loin du compte, du montant réel de la fraude volontaire ou pas.
Il faut savoir que 2500 plaintes ont été déposées et 100 millions d'indus au titre du fonds de solidarité ont été recouvrés. Pour les demandes détectées en amont, le montant de la perte évitée s'élèverait à 10 milliards €. D'où l'importance de la mise en place d'un contrôle a priori, lors de la mise en place de système d'aides. Surtout que l'adaptabilité des professionnels pour bénéficier des aides, subventions, etc... se vérifie toujours. Le Parisien publie quelques ficelles utilisées, notamment le changement de secteurs d'activité pour pouvoir continuer à bénéficier toujours de plus d'aides…
Face à cela est-ce que d'autres critères pour des contrôles a posteriori sont prévus ? Le ministre n'a pas abordé cette question. Pourquoi ? La fraude évitée est pourtant plus que significative : 10 milliards €.
On le voit, malgré la relation de confiance instituée par la loi Essoc, la fraude volontaire ou pas existe. Face à ce phénomène qui nous coûte un « pognon de dingue », (cf notre évaluation 60-80 milliards €) il est temps d’avoir un véritable plan de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales mais pour cela la DGFiP a besoin de moyens humains, matériels et juridiques, de formation. Plus que jamais Solidaires Finances Publiques n’aura de cesse de revendiquer plus de justice fiscale pour plus de justice sociale.