Les SIE dans la tourmente ? Surtout les SIE toumentés !
L'actualité a conduit Solidaires Finances Publiques à adresser un courrier à la DG sur les SIE.
Solidaires Finances Publiques
à
Audran LE BARON
Chef de service – Législation fiscale
Monsieur le chef de service,
Depuis de trop longs mois, nous insistons auprès de l’Administration sur le malaise grandissant des agents des SIE qui sont confrontés à une dégradation sans précédent de leurs conditions de travail et de leurs repères fonctionnels compte tenu de l’état d’affaiblissement de cette structure.
Nous ne reviendrons pas dans ce courrier sur la question centrale de l’emploi, même si nous estimons que la « réanimation » des SIE doit passer par une réimplantation soutenue d’emplois C et B notamment. Il est en effet indispensable de rétablir sans délai la force de travail dans les SIE afin qu’ils puissent mener à bien toutes leurs missions de service public, ce qui n'est plus le cas actuellement.
Pour Solidaires Finances Publiques, l’heure est grave.
La déconnexion des SIE des réalités de terrains, renforcée par une législation inadaptée aux réalités du monde moderne, conduit à l’émergence de nouvelles formes d’incivilités fiscales en matière de fiscalité professionnelle. Les agents perçoivent, plus que tout autre, la montée en puissance de nouvelles inégalités fiscales qui, à un moment ou à un autre, deviendront évidentes aux yeux de la société. Ces derniers ne veulent pas en être comptables et ils attendent que l’Administration, dès à présent, s'engage avec détermination pour définir une politique de gestion des professionnels permettant d'améliorer la prise en compte et le suivi de toutes les activités professionnelles, y compris celles qui relèvent des économies numériques ou des micro-entreprises.
Cette déconnexion renforce par ailleurs les dualités et les inégalités entre les professionnels respectueux de leurs droits et les autres, entre les professionnels en capacité de recourir à des prestataires extérieurs pour les accompagner dans leurs démarches fiscales et les autres. Ce sont ces petites entreprises que les agents des SIE rencontrent au quotidien et, force est de constater, que les moyens alloués pour être à leur écoute ne sont pas à la hauteur des enjeux d’un service public de proximité inscrit dans une vision pro active de l'économie.
La volonté d'instaurer partout des accueils sur rendez-vous génère de fait des tensions et des incompréhensions. Là où il faudrait laisser de la place à « l'intelligence de la gestion », l'Administration décide de tout rigidifier en affaiblissant encore plus la mission auprès des plus petits. Ces « petits » qui sont pourtant indispensables sur le plan économique.
Notons que les personnels des SIE ne sont toujours pas dotés d'une connexion dite «full internet» malgré toutes leurs demandes.
Une autre problématique demeure dans l’ombre et elle n’est pourtant pas dénuée d’intérêt : l’absence totale de visibilité sur les modèles U. Le manque à gagner fiscal est réel et pourtant, la mission demeure en déshérence ou presque.
L'actualité est inquiétante, car les dysfonctionnements qui entourent la campagne de relance de la CFE ont conduit à alourdir les tâches déjà gigantesques des SIE, mais également à ternir l'image de la DGFiP. Sur ce point, les agents ont dû faire preuve de beaucoup de diplomatie pour justifier une erreur qui est la résultante de l'industrialisation non sécurisée, par l'intervention humaine, de certaines tâches. Mais cela ne suffisait pas et les incidents qui entourent depuis maintenant plusieurs semaines le site impôts.gouv mettent en évidence la fragilité de notre cathédrale informatique face à des attaques extérieures. Nul n'est dupe et votre note de service du 17/11/2016 n'a pas rassuré les agents qui sont conscients que les incidents rencontrés vont bien au-delà d'une simple tentative massive de fraude à la TVA. Sur ces questions, les agents ont droit à la transparence car, sur le terrain, ce sont eux qui doivent affronter les griefs formulés par les usagers. Leur demander de le faire, sans une parole de vérité en amont, est inacceptable pour ne pas dire coupable.
L’heure est également grave face aux réorganisations des SIE. Ces réorganisations qui s’appuient plus particulièrement sur des fusions conduisent à industrialiser l'organisation du travail en cloisonnant les tâches. Les agents sont dès lors confinés à une vision très parcellaire des dossiers qu'ils ont en charge, sans perception des liaisons inhérentes à la chaîne de travail. Cette fragmentation des chaînes de travail, ce cloisonnement des agents dans des silos fonctionnels hyper-spécialisés conduisent à fragiliser l'architecture même des missions et sont générateurs de déqualification, de perte de repère et donc de souffrance.
L’heure est aussi grave au quotidien. Le déploiement de RSP ne va pas sans poser de grandes difficultés et génère de fait du travail supplémentaire et du stress. La mission de recouvrement demeure très fragile et constitue souvent une variable d’ajustement aux surcharges de travail. De plus, lors du lancement de la départementalisation des procédures collectives, les instructions au réseau prévoyaient que le stock des procédures existantes à la date de généralisation, soit le 1er septembre 2014, serait transféré aux PRS au plus tard le 31 décembre 2016, selon un calendrier et des modalités à définir localement. Hors, certaines directions ne respectent pas vos directives en la matière et n'ont pas procédé au transfert des stocks avant le 31/12/2016, comptant sur l'extinction spontanée du stock dans les SIE/SIP/trésoreries. Cette situation crée d'importantes disparités de charges entre les services. Il s'agit des directions des Bouches-du-Rhône, des Pyrénées-Orientales, des Vosges, de la Seine-Saint-Denis et de la Guadeloupe.
La gestion des «petites cotes» de CFE qui continuent de s'empiler année après année est le signe que la gestion des petites entreprises, et notamment des auto-entrepreneurs, est considérée comme négligeable par la Centrale et les directeurs locaux, alors que tel n'est pas le cas. Par ailleurs, les agents sont confrontés à de grandes difficultés dans la gestion des créations-cessations compte tenu de multitudes d'incidents (adresses erronées ou fausses, mauvaise compréhension des régimes, options mal prises en compte, etc...) et ce ne sont pas les politiques d'archivages et de dématérialisation qui permettent d'amoindrir les difficultés rencontrées, bien au contraire.
L’heure est également préoccupante en matière de formation. En effet, trop de besoins de formation et de soutien ne sont pas pris en compte et réalisés. Cette fragilisation du corpus des savoirs, des savoir-faire, notamment pour les agents en prise de poste, pèse lourdement sur la qualité d’exercice des missions et sur les conditions de vie au travail des agents.
Ce constat, partiel au demeurant mais en rien partial, nécessite que la Direction Générale s’engage sur une autre voie.
Une voie s’appuyant d’une part sur une pause qualité permettant aux agents de reprendre leur souffle et de s’approprier sereinement leurs nouveaux outils mais également d’apurer les retards dans leurs travaux. Ceci nécessite notamment d’en finir avec la répétition de mesures de simplifications qui n'en sont pas en réalité.
Une voie comportant également un soutien réel envers les agents afin qu’ils puissent dérouler, au sein de la DGFi,P des parcours de carrière et fonctionnels riches, valorisants et choisis. Ce soutien étant largement adossé aux politiques de formation et par un accompagnement technicien.
Une voie réaffirmant l’importance des missions de proximité et leur donnant tous les moyens pour être exercées dans les meilleures conditions. Ceci nécessitant la réaffirmation d’une vraie politique d'accueil et de gestion de proximité qui soit attentive des attentes et des contraintes des usagers professionnels. Ce qui nécessite que les services aient des moyens et notamment des moyens humains, pour mener à bien cette mission avec un réel objectif qualitatif à la clé.
Une voie qui ne soit pas une impasse de confrontation entre des objectifs souvent irréalistes et la réalité du quotidien, entre un management fondé sur des injonctions et non sur une attention portée aux problématiques professionnelles et personnelles.
Telle doit être l’orientation que la DGFiP doit prendre pour construire le service public fiscal des professionnels du XXIe siècle.
Bien cordialement.