Annoncé en mai dernier par Gabriel ATTAL, alors ministre de l’Action et des Comptes Publics, dans son plan de Lutte contre toutes les fraudes, la création d’un Conseil d’Évaluation des Fraudes (CEF) a vu le jour ce mardi 10 octobre sous l’ère de Thomas CAZENAVE, nouveau ministre en charge des comptes publics.
Certes, l’idée d’évaluer la fraude fiscale n’est pas nouvelle et revient en force à chaque nouveau scandale (Luxleaks, Panama Papers….). Jusqu’à présent, la France était demeurée en retrait alors que de nombreux pays procèdent à une telle évaluation.
Conscient des enjeux économiques et sociétaux, Solidaires Finances Publiques, a, dès 2013 produit une estimation sérieuse, documentée et reconnue de la fraude fiscale. En 2018, en réaction à l’actualisation de notre première estimation (entre 80 et 100 Mds d’euros), Gérald Darmanin avait lancé un projet d’évaluation, qui s’était soldé par une timide tentative de contrôles aléatoires ou randomisés.
Dans son rapport de 2019, la Cour des comptes avait également émis comme principale recommandation d’effectuer une évaluation régulière de la fraude.
Il aura fallu attendre octobre 2023 pour voir naître le CEF. Sa création poursuit les trois objectifs suivants :
- définir une méthode harmonisée et partagée d’évaluation pour connaître le montant de la fraude,
- appréhender les nouvelles pratiques et les phénomènes émergents de la fraude (notamment liés au développement du numérique),
- et améliorer les leviers de la lutte contre la fraude.
Ce conseil, à la composition hétéroclite, réunit 27 membres de diverses administrations (dont Jérôme Fournel, Directeur Général de la DGFiP), des autorités indépendantes (Cour des comptes, CPO), des personnalités qualifiées (dont des économistes) et des parlementaires.
Pour Solidaires Finances Publiques, réunir des profils et compétences variés est certes intéressant, mais tenter de faire coexister des modes de pensée totalement opposés peut constituer un frein à l’avancée des travaux de ce conseil. La présence de Madame Verdier-Molinié, connue pour ses différents travaux notamment au sein de l’IFRAP et ses positions ultra-libérales et anti-fonctionnaires aux côtés de l’économiste Gabriel Zucman, connu pour ses travaux sur les inégalités sociales et les paradis fiscaux interroge grandement et relève du défi.
Or, la création de ce CEF oblige à des résultats concrets et efficaces en matière de lutte contre la fraude fiscale et doit contribuer à retrouver une cohésion sociale dans laquelle le consentement à l’impôt et l’équité fiscale ont toute leur place.
Pour l’heure, les premiers travaux consisteront :
- à actualiser les travaux disponibles sur la fraude à la TVA et à avancer vers une évaluation de la fraude à l’impôt sur les sociétés et à l’impôt sur le revenu
- à approfondir les études sur le marché parallèle du tabac
- à actualiser les évaluations du travail dissimulé sur la base de contrôles aléatoires et de poursuivre les travaux d’extension des évaluations à toutes les formes de fraude aux dépenses d’assurance maladie.
Ce programme est très ambitieux. Solidaires Finances Publiques se contentera de rappeler que la fraude sociale représente 10 Mds d’euros tandis que la fraude fiscale représente 80 à 100 Mds d’euros.
Réuni tous les 3 mois, un premier bilan d’étape sera effectué en juin 2024.
En attendant, Bon Vent au Conseil d’Evaluation des Fraudes !