La première Commission Administrative Paritaire ( CAP ) de recours d'évaluation s'est tenue du 2 au 4 juillet 2025. Une vingtaine de dossiers étaient examinés.
Liminaire
Paris le 2 juillet 2025,
Monsieur le Président,
Le contexte international marqué par les conflits, est particulièrement préoccupant. Solidaires Finances Publiques condamne fermement tous les actes de guerre et d’oppression visant les populations civiles, quelles qu’elles soient.
Alors que cette guerre a des répercussions sur notre territoire avec notamment la montée des actes islamophobes et antisémites en France, Solidaires Finances Publiques rappelle ses valeurs fondamentales et son attachement à lutter contre tous les racismes.
Au niveau national, le changement de Premier Ministre n’a, sans surprise, rien changé à la politique menée depuis des années.
Le dialogue social est toujours une chimère : ainsi, le conclave sur les retraites a fait pschitt.
Cet échec était programmé depuis le départ. Ni le gouvernement ni le patronat n’entendaient concéder quoi que ce soit aux travailleurs. Encore moins revenir sur les 64 ans d’âge légal de départ.
Les fonctionnaires sont encore et toujours les boucs émissaires de la dépense publique et prendront notamment de plein fouet la réforme de l’indemnisation des jours d’arrêt de maladie qui passe de 100 % du salaire à 90 %.
Au niveau ministériel, le choix de l’opérateur santé, pour la mise en place de la protection sociale obligatoire au 1er janvier 2026 est pour nous le choix du pire. Cet opérateur privé, la fragile startup ALAN, à la pérennité non assurée, est à l’opposé des valeurs mutualistes et sa logique première sera de faire des bénéfices.
Ce choix, purement idéologique rompt radicalement avec l’histoire fondatrice en matière de protection sociale complémentaire aux finances, basée notamment sur la proximité, au contraire d’ALAN dont la relation avec l’assuré sera exclusivement digitale.
La responsabilité du Ministère est désormais de s’assurer de la fiabilité du système et de la sécurité des données, et pour notre part, nous nous assurerons, dans l’instance paritaire dédiée, du respect de l’accord par ALAN, à la virgule près, pour défendre aux mieux les intérêts des agents, de leur famille et des retraités.
Au niveau de la DGFiP, les perspectives ne sont pas réjouissantes :
Économies budgétaires, austérité vont encore peser sur le volume des emplois, le fonctionnement de la DGFiP, les possibilités de promotion et la rémunération des agents des Finances publiques, délitant encore un peu plus le service rendu aux usagers, aggravant la non-attractivité de la DGFiP et appauvrissant le Service Public en général, pourtant au coeur des besoins de la population.
Solidaires Finances Publiques continuera à exiger des moyens suffisants pour assurer la qualité des missions de la DGFiP notamment en matière d’emplois statutaires, une amélioration réelle des conditions de travail des personnels et une revalorisation de la rémunération que ce soit en termes de points d’indice et de sa valeur qu’au niveau de la partie indemnitaire.
La gestion des ressources humaines à la DGFiP, ou plutôt le « management » pour employer vos termes est catastrophique à tous les niveaux.
Une petite lumière au fond du tunnel pour nos camarades de la Réunion et qui fait suite à nos nombreuses interpellations : la création annoncée d’un CC pro à Saint Benoît à l’horizon 2026, qui nous l’espérons va faciliter le retour dans le département des nombreux collègues en attente.
L’introduction du choix et du mérite, avec notamment les grands bouleversements des règles de mobilité en particulier pour la catégorie A, va conduire à des profondes désillusions chez les agents et à des difficultés de fonctionnement à très court terme.
Nous ne doutons pas que les premiers bilans vont conforter nos analyses.
L’évaluation est, depuis la loi de 2019, la pierre angulaire de la carrière des agents et devient un « acte managérial ».
Elle est censée constituer la notion de mérite qui conditionne désormais la quasitotalité des actes de gestion dont dépendent les avancements de carrière et donc la rémunération, mais aussi maintenant la mobilité.
Pour Solidaires Finances Publiques, l’évaluation individuelle telle qu’elle est mise en place à la DGFIP ne peut en aucun cas constituer un critère de mérite et donc de départage des agents, tant elle est subjective et non harmonisée. Son caractère subjectif est aggravé par les nouvelles modalités d’évaluation qui laissent la part belle aux qualités rédactionnelles d’un N+1, qui n’est pas nécessairement le même
pour l’ensemble des agents du service. L’abaissement du niveau de l’autorité hiérarchique au N+2 ( souvent au niveau du service) ne permet plus la nécessaire harmonisation départementale des évaluations.
Et que dire lorsqu’il s’agit de mettre en perspective 2 évaluations d’agents de directions différentes.
Pourtant, les actes de gestion, eux, sont bien élaborés au niveau national et les agents sont donc départagés sur des bases inéquitables.
Ainsi, les promotions par tableau d’avancement des B et C devraient, pour nous, relever d’un déroulé de carrière linéaire et non d’une course de haies. L’évaluation individuelle est trop subjective pour avoir de telles conséquences sur la carrière des collègues.
De plus, en ce qui concerne les promotions dans de B en A, le manque de transparence de l’analyse des dossiers des candidats génère plus d’amertume et de perte de confiance envers la DGFiP qu’elle ne motive les agents .
Dès lors, nous contestons avec force l’utilisation de l’évaluation pour déterminer la carrière des agents.
Nous expérimentons cette année la tenue des CAP de recours dès le mois de juillet, et dans un format différent de celui des autres années.
L’idée de libérer du temps au mois de septembre correspond à nos souhaits, mais nous ne vous cachons pas que la nouvelle période choisie est également contrainte pour les élus qui gèrent dans la période la campagne des premières affectations des B.
Sur le format, 2 jours de préparation et 2 jours de CAP, il correspond à ce que nous demandons et nous espérons que ce format deviendra la norme à l’avenir.
Compte tenu de l’avancée de la date de CAP, nous supposons que les statistiques communiquées ne sont pas encore fiabilisées (sur les recours CAPN à tout le moins) puisque nous avons encore, pour notre part, des dossiers en cours de procédure.
Pouvez-vous nous donner des éclaircissements sur votre méthode de comptabilisation et sur la possible évolution de ces chiffres ?
Cela étant, ces chiffres permettent de constater une légère diminution du nombre de recours AH, mais avec une proportion de modifications des CREPS à ce stade, quasi identique à l’année précédente.
Pour le nombre de recours en CAPN, nous attendrons les chiffres définitifs pour nos analyses, mais globalement, le volume de recours semble se stabiliser autour d’une centaine par an, ce qui correspond aux volumes habituels constatés en dehors de l’année problématique (2023 gestion 2022).
Dans sa note de campagne de janvier 2025, la cheffe du Service RH se félicite de la diminution significative du volume de recours et y voit une meilleure acculturation collective à l’exercice managérial structurant qu’est l’évaluation.
Nous ne partageons pas cette analyse : pour nous, l’évaluation à la DGFIP n’est pas encore un exercice maîtrisé par le collectif : Le volume encore significatif et le contenu des recours montrent qu’il y a encore beaucoup de travail pour qu’elle soit appréhendée plus objectivement.
Enfin, le critère de la diminution du volume de recours ne constitue pas à lui seul le gage d’une meilleure acculturation, si l’on en croit les remontées de terrain qui nous alertent sur le nombre d’agents qui ne font pas recours soit parce qu’ils sont désabusés, n’ont pas confiance dans l’objectivité de la hiérarchie, n’ont pas le mental pour se lancer dans la course d’obstacle que constitue le recours ou même certains qui ont peur des représailles.
Si nous avons noté une volonté de clarifier l’exercice, il reste des sujets à régler et il va également falloir persévérer dans la pédagogie.
Un point positif avant les points négatifs :
- La sécurisation du délai de recours après décision de l’AH par la modification de l’applicatif ESTEVE suite à nos demandes est une bonne chose.
Les points négatifs :
La limitation des recours en CAPN a effectivement été favorisée par une meilleure approche au niveau de l’AH suite aux consignes. Le recours à l’utilisation en amont du retour au N+1 a lui aussi visiblement mieux fonctionné mais des dérives ont été constatées avec des agents qui se sont retrouvés avec un CREP pire que l’initial.
Nous vous demandons de clarifier ce sujet à l’avenir : si un agent demande une modification au N+1 via cette fonctionnalité, soit le N+1 accède à la demande et modifie dans ce sens, soit il n’y accède pas et il ne doit pas changer le CREP initial, l’agent décidant ensuite de faire un recours ou pas.
Nous réitérons notre demande de communication systématique aux agents d’un projet de CREP avant l’entretien, afin de permettre à l’agent de se préparer au mieux.
Dans le guide de l’évaluateur, dans la case « Transparence » qui constitue l’un des cinq objectifs de l’entretien professionnel il est écrit :
L’évaluateur peut s’il le souhaite remettre à l’agent avant ou lors de l’entretien le projet du CREP qu’il a préparé pour garantir la transparence de l’échange, nourrir le dialogue entre évalué/évaluateur ; ce projet de CREP pourra évoluer suite à cet échange avec accord des deux acteurs concernés. Pour nous le « s’il le souhaite » est en trop . Pour quelle raison un chef de service ne souhaiterait pas être transparent ?
Cela nous inquiète et augure mal de la sincérité des échanges au cours de l’entretien.
Les fiches préparatoires
Concernant les fiches préparatoires obligatoires lors d'un changement d'affectation de l'agent ou du changement d'évaluateur : si l'objectif de ces fiches est de garantir à chaque agent une évaluation professionnelle exhaustive et cohérente sur l'année de gestion examinée, elles ne peuvent en aucun cas servir d'exutoire au chef de service qui ne doit pas s’en servir pour « régler ses comptes ». Certains agents tels que les stagiaires qui n'ont pas eu d'entretien professionnel ont eu, eux, la surprise de découvrir cette fiche préparatoire que lors de la signature de leur CREP.
Nous souhaiterions que les agents soient alertés, via l’applicatif si possible, de l’insertion d’une fiche préparatoire dans ESTEVE, et qu’elle soit systématiquement communiquée à l’agent lorsque celle-ci n’a pas pu, pour des raisons techniques, être rédigée dans ESTEVE.
Nous persistons à dire que les niveaux actuels des évaluateurs et de l’autorité hiérarchique ne sont pas adaptés et qu’il y a lieu de les repositionner au niveau, respectivement, des chefs de service et de la Direction.
Dans l’attente, il devient nécessaire de clarifier plus avant la notion d’évaluateur et donc la notion de pilotage de service afin que l’évaluateur ait une réelle légitimité.
Il y a beaucoup de frustration et d’incompréhension chez les agents qui sont évalués par un évaluateur qui ne les encadre pas au quotidien et qui ne connaît en rien la réalité de leur travail et de leurs compétences. Ces CREP sont généralement contestés.
Nous aurons des cas où les agents d’un même service ne sont pas tous évalués par la même personne : ce n’est pas normal.
Visiblement, malgré les consignes visant à « déminer » les conflits ou relations conflictuelles au niveau de l’AH, des dossiers sur ce thème sont remontés à la CAP nationale. Ces sujets sont inquiétants et vont bien au-delà de l’exercice d’évaluation.
La DGFiP doit prendre conscience du mal-être des agents et des conditions dans lesquelles ils exercent leurs missions.
Nous attirons également votre attention sur le sujet de l’évaluation des collègues en situation de handicap. Que les dossiers remontent ou pas en recours, il y a une vraie difficulté de formation des évaluateurs sur la prise en compte du handicap, y compris au regard de l’évaluation. L’agent doit être évalué en fonction de ce qu’il lui est possible par rapport à son handicap et non en comparaison des performances d’un
agent valide et c’est bien toute la difficulté. Nous souhaiterions que ce sujet, qui entre en plein dans le champ des orientations sur la lutte contre les discriminations et pour l’égalité des chances, soit débattu pour que des consignes d’approche particulières figurent dans les guides d’évaluation.
Nous porterons également cette demande au GT Handicap qui se tiendra demain.
Le traitement des agents qui reviennent dans les services après une période de maladie, parfois à temps partiel thérapeutique, ou qui ont des absences significatives pour maladie au cours de l’année de gestion, doit aussi être adapté à leur situation personnelle. Au delà de la bienveillance nécessaire à toute évaluation, ces agents doivent être évalués en fonction de leur temps de présence et ne doivent pas être
pénalisé par leur situation de santé.
Nous vous demanderons au cours de ces CAP de recours, une attention toute particulière sur ce type de dossiers.
Certains dossiers que nous aurons à examiner au cours de ces CAP sont des dossiers lourds, avec parfois des contextes relationnels difficiles.On note sur ces dossiers une grande incompréhension entre évalué et évaluateur, mais surtout pour beaucoup, une grande souffrance. Ces difficultés en tant que telles ne se résoudront évidemment pas par le biais de la CAP de recours, mais l’écoute de l’administration, un signe donné en regard de la souffrance des agents sont primordiaux pour l’apaisement de ces situations. Les agents doivent retrouver confiance dans l’objectivité de la hiérarchie ou, à tout le moins, dans la capacité de celle-ci à reconnaître qu’à minima les torts puissent être partagés.
Ce sentiment des agents que leur point de vue n’est jamais pris en compte les conduit de plus en plus à demander un changement de service, qui constitue leur seule échappatoire.
Sur ces dossiers, la DG dans sa globalité doit prendre la mesure de ces cris d’alarme des agents qui n’ont plus que ce moyen du recours pour se faire entendre. La gravité de certaines situations mises en exergue dans le cadre des recours mériterait que le relai soit fait avec les autres bureaux de la DG pour que les problèmes soient traités au bon niveau.
Nous souhaiterions également que des consignes claires soient données aux directions locales sur le traitement de l’évaluation des agents en contexte disciplinaire, et à fortiori lorsque l’affaire n’a pas encore été traitée en Discipline. Si l’on peut entendre qu’il y ait une incidence sur la partie de l’évaluation en lien avec la faute commise, il n’est pas normal que les évaluations soient drastiquement dégradées par principe sur l’ensemble des critères, y compris ceux qui n’ont aucun lien avec la faute commise. Une telle approche peut être considérée à juste titre
comme une double peine.
Nous attendons donc de cette CAP qu’elle joue pleinement son rôle d’arbitre. Elle doit prendre en compte la parole de l’agent, qui s’exprime par les élus.
La procédure doit être respectée, l’agent fait son recours auprès de la CAPN, le N+1 répond avec parfois des arguments nouveaux et il ne serait pas acceptable que la contradiction portée par l’agent lors de la CAP via la voix des capistes ne soit pas entendue, sous prétexte que l’évaluateur n’aurait pas pu user de son droit de réponse.
Nous espérons que nos échanges permettront de donner satisfaction au maximum de collègues et que ne doutez pas que nous mettrons en oeuvre toute notre conviction dans la défense des dossiers de nos mandants.
Compte Rendu
En cours de rédaction.