Édouard Philippe a confirmé l'exonération de la taxe d'habitation pour 80 % des ménages d'ici 2019, aux motifs que c'est un impôt injuste et de redonner du pouvoir d'achat
Si cette orientation peut avoir un écho favorable auprès des citoyens, elle amène quelques remarques.
Tout d'abord, en 2014, la fiscalité locale aura permis la collecte de 128,5 Mds€, soit 55% des ressources des collectivités territoriales. La fiscalité directe locale est composée de la taxe d'habitation, de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, de la contribution économique territoriale (CET), héritière de la taxe professionnelle. Ces recettes offrent aux collectivités locales une certaine autonomie financière, principe acté dans la loi de mars 2003 et intégré par la suite dans l'article 72-2 de la Constitution. Ainsi, le choix d’exonérer 80 % des ménages, même si le gouvernement prétend compenser à l'euro près la perte de recette induite, interroge ce principe constitutionnel.
Ensuite, la Taxe d'habitation est calculée sur la base de la valeur locative des locaux déterminée par l'administration fiscale à laquelle s'applique un taux voté par la collectivité. La révision des valeurs locatives cadastrales devaient initialement être triennale (ce principe est toujours inscrit dans les textes). Faute de moyens suffisants et de volonté politique, cette révision n'a jamais été mise en œuvre depuis 1980, année d'intégration de la révision dite de 1970. Aussi les valeurs locatives sont actualisées tous les ans via un coefficient d'actualisation voté annuellement par le législateur. Une nouvelle révision des VL a été lancée en 2016, dans plusieurs départements d'expérimentation (la révision des VL des locaux professionnels est désormais en vigueur depuis le 1er janvier 2017).
On peut donc aussi considérer que la détermination de la base est de nature à engendrer des injustices entre contribuables d'une même commune ou de communes différentes.
De plus, on peut légitiment s'interroger sur le devenir des investissement publics. Les collectivités locales réalisent près de 70% de l’investissement public civil (58,8% de l’investissement public d’ensemble en 2013). Ces investissements participent activement à la relance économique en faisant appel souvent aux acteurs économiques locaux.
Enfin, le fait d’exonérer 80 % des ménages ne donnera par un traitement équitable sur l'ensemble des ménages, puisque le montant de l’exonération sera différenciée selon son lieu de résidence et les personnes de conditions modestes qui bénéficient d'ores et déjà d’exonération ou d'abattement ne bénéficieront pas de ce « souffle fiscal » en termes de pouvoir d'achat.
Ainsi, cet impôt peut sembler injuste au gouvernement, Solidaires Finances Publiques rappelle que la fiscalité a un rôle déterminant dans le financement de l'action publique et que le non consentement à l’impôt qui semble se propager nécessite la mise à plat de l'ensemble du système fiscal, pour qu'il soit plus juste, moins complexe et plus stable.
Communiqué de presse : la taxe d'habitation, un impôt injuste ?