Dès les propos introductifs du Directeur Général Adjoint, nous avons compris que ce GT constituait une nouvelle phase d’échanges et de concertation, ponctuée ici ou là de mesures possibles à envisager, mais sous réserve de «leur faisabilité» tant technique que financière. Dans ce groupe de travail étaient désignés non grata les sujets liés aux attaques contre les fonctionnaires ou aux conséquences de la loi Essoc dans le relationnel vérificateur-contribuable.

Liminaire

Nos propos liminaires seront axés essentiellement sur les documents de ce groupe de travail mais nous tenons dans cette déclaration à rappeler notre opposition ferme et déterminée au projet gouvernemental sur les retraites. Opposition largement partagée et confirmée par la participation importante des collègues de la DGFiP aux journées de mobilisation des 19 et 31 janvier 2023.

Par ailleurs, Solidaires Finances Publiques réitère sa condamnation, condamnation exprimée dans notre courrier au DG du 26 janvier, de la communication intrusive du Ministre de la Fonction et la Transformation Publiques qui a utilisé les canaux de la DGFiP pour porter sa propagande. Alors que ce gouvernement œuvre pour réduire les droits des représentantes et représentants des personnels et dénigre de façon délibérée les syndicats qui ne partagent pas sa vision sur le financement des retraites mais plus largement les choix opérés en matière de politiques publiques, de services publics... notre organisation syndicale dénonce et condamne cette stratégie de communication dogmatique et partisane qui met en danger la démocratie sociale et plus largement le contrat social qui fait notre société.

Avant d’en venir à l’ordre du jour de ce GT, nous souhaiterions avoir des nouvelles de la brigade d’Arras et connaître l’état d’avancement de l’enquête du CHSCT du Pas-de-Calais.

S’agissant de l’ordre du jour de ce GT, nous effectuerons plusieurs constats :

Solidaires Finances Publiques note avec satisfaction que les agent.es en charge de la mission de contrôle fiscal sont attachés à leur mission, et notamment au contrôle fiscal externe. Ce constat ressort clairement des documents et des propositions du GT acteurs "métiers" et se trouve conforté par les nombreux échanges que nous avons eus avec nos collègues.

Cependant, la lecture des compte-rendus des 2 GT avec les acteurs « métier » montre également que les dispositifs (circulaire de 2013, référent protection juridique…) mis en place en matière de protection des agents ne sont pas ou peu connus. Pour Solidaires Finances Publiques, la première préconisation est de s’assurer de la diffusion et de l’appropriation effective des mesures et dispositifs existants, et ce par tout moyen (onglet spécifique sur les sites, livret d’accueil, formations régulières…).

Si les questions déontologiques semblent être une priorité en plein essor, la question des droits des agents et des agentes demeure secondaire. Solidaires Finances Publiques exige en conséquence que les agentes et les agents soient correctement informés de leurs droits. La défiance à l’égard des agents qui règne dans les services n’est pas propice à libérer leur parole sur les difficultés rencontrées dans l’exercice de leurs missions.

En matière de protection et de sécurité des agents, la formation professionnelle est un élément essentiel et doit s’adapter en fonction du public auquel elle est dispensée. Elle doit en effet concerner les agents et les agentes mais également les directions locales (services RH, division de contrôle…) et la hiérarchie de proximité. Cette dernière, bien souvent malmenée et constamment sous pression, finit par perdre de vue que la mission de contrôle fiscal mérite une attention particulière et en oublie sa responsabilité en matière de sécurité. Il n’est plus acceptable d’entendre que la mission passe avant la sécurité ou qu’un agent ou une agente doive s’interroger sur sa capacité à la remplir. Enfin, la formation en matière de protection et de sécurité des agent-es passe aussi par la transmission « informelle » d’informations et de gestes métiers entre collègues plus chevronné-es et débutant-es dans le contrôle fiscal. Ainsi notre organisation déplore la suppression du stage premier métier qui permettait de tels apprentissages.

De la même manière, mettons fin à l’hypocrisie qui entoure les fiches de signalement dans la sphère du contrôle fiscal. Il appartient à la Direction Générale d’exiger de ses directions locales une totale transparence sur le sujet. La fiche de signalement doit être systématique et obligatoire : il n’est plus acceptable d’entendre qu’un agent ou une agente ne souhaite pas la rédiger alors même que toute personne qui a connaissance d’une incivilité ou agression peut la remplir. Lors de la première réunion de ce GT, il a été dit que la parole devait se libérer, la parole ne pourra se libérer que si l’écoute est présente et de qualité.

Il n’est plus acceptable de voir un agent, une agente dissuadée de rédiger une fiche de signalement.

Il n’est plus acceptable d’entendre qu’un agent, une agente victime d’une incivilité ou d’une agression en est au final peut-être responsable.

Il n’est plus acceptable de constater qu’un agent, une agente se refuse à remplir une fiche de signalement par peur de représailles ou par peur de voir ses qualités professionnelles remises en cause.

La Direction Générale doit imposer la culture de la fiche de signalement, la considérer comme un outil utile dans les remontées des incidents et violences vécus sur le terrain et la traiter chaque fois en fonction des enjeux soulevés.

La Direction Générale doit doter ses directions locales d’outils appropriés pour répondre à tout acte d’incivilité et les obliger à répondre systématiquement en adaptant la réponse à l’agression subie. De la même manière, les actes malveillants, violents effectués à l’encontre des agents et des agentes des Finances publiques, tant dans la presse que sur les réseaux sociaux, doivent donner lieu à un droit de réponse et être systématiquement poursuivis.

Enfin, sur ce point, nous demandons à ce que le relevé des décisions de justice prononcées en faveur des personnels et de l’administration soit publié chaque année.

À ce stade de nos échanges, subsistent plusieurs inconnues.

La Direction Générale retranscrit les propositions des uns et des autres, sans être elle-même force de propositions et surtout sans indiquer les moyens qu’elle a à sa disposition ou qu’elle entend consacrer à la protection de ses personnels.

Solidaires Finances Publiques rappelle que la question des moyens ne doit pas être un frein à la mise en place de mesures plus protectrices pour les agents et les agentes. Ainsi, qu’en est-il des moyens budgétaires liés par exemple à l’acquisition d’équipements (véhicules de service) mais aussi de moyens humains ? Pour mémoire, 4 000 emplois ont été supprimés dans les services du contrôle fiscal. À titre d’exemple, les équipes d’appui présentes dans certains services (souvent les Dircofi) avaient la possibilité d’accompagner les vérificateurs et les vérificatrices sur place. Aujourd’hui, leurs suppressions poussent les agent-es, y compris les chefs de brigade, à renoncer à la mise en place de binômes pour ne pas surcharger un collègue ou simplement pour des questions de cadencement ou d’objectifs. La circulaire de 2013 peut préconiser le recours aux binômes, si les effectifs en place ne le permettent pas, ce dernier ne verra pas le jour. Ce GT ne peut participer à cette nouvelle hypocrisie. Lors de l’audience avec les représentants et représentantes des personnels, Gabriel Attal, ministre des Comptes publics, a demandé des améliorations concrètes. Pour Solidaires Finances Publiques, cesser les suppressions d’emplois à la DGFiP et renforcer chacune des missions est certainement la première des priorités.

De la même manière, les documents transmis font état de consultations/rencontres avec d’autres organismes ou administrations de contrôle, sans préciser ce qu’il en est ressorti. Pouvez-vous nous en dire davantage sur la nature de ces échanges et leurs éventuels apports ?

Si beaucoup de pistes d’amélioration proposées par le GT acteurs « métiers » vont dans le même sens que celles évoquées par les représentants et représentantes des personnels, nombre d’entre elles ne sont pas suffisamment abouties et demandent des précisions complémentaires.

Par ailleurs, trop de propositions sont liées à la seule appréciation des vérificateurs, les laissant seuls responsables de la décision à prendre. La question de la protection des agents et des agentes ne peut dépendre de leur seul libre arbitre : il appartient à chacun des intervenants dans un dossier de prendre sa part de responsabilité, tout en rappelant la responsabilité de l’employeur en matière de santé et de sécurité au travail. Il faut cesser de faire croire que les problèmes sont liés à la responsabilité individuelle des agents et des agentes quand ils reposent en fait majoritairement sur un système désorganisé par des années de restructurations ou plutôt de destructurations, suppressions de postes...

Solidaires Finances Publiques s’étonne enfin que les acteurs "métier" n’évoquent à aucun moment les difficultés liées au contexte politique et à l’évolution d’une administration de contrôle qui se transforme peu à peu en administration de services. À ce titre, la mise en place de la loi Essoc et de la relation de confiance a de forts impacts sur la relation au contribuable. À ce propos, la réponse du cabinet de la présidence de la République à notre courrier à Emmanuel Macron du 7 décembre, n’est pas rassurante sur l’évolution de la mission du ontrôle fiscal. Décidément, l’écoute au niveau des responsables politiques reste de faible niveau dans ce domaine comme dans d’autres.

Pour Solidaires Finances Publiques, ce point est fondamental : toutes les réunions et concertations que nous avons menées avec les agents et agentes en charge de la mission de contrôle fiscal font clairement ressortir les conséquences du changement de philosophie du contrôle fiscal dans le relationnel avec les contribuables, sur l’exercice de leur mission de contrôle fiscal et plus largement sur leurs conditions de travail.

Sur ce dernier point, vous ne pouvez ignorer l’expression des agents et des agentes, retranscrite par ailleurs dans les outils que vous avez mis en place (DUERP, Observatoire interne...).

Sans reprendre chacune des pistes d’amélioration proposées, dont certaines existent déjà depuis la circulaire de 2013, et sur lesquelles nous reviendrons en séance, Solidaires Finances Publiques souhaite néanmoins effectuer quelques focus. Il est effectivement primordial que ce groupe de travail débouche sur des solutions concrètes, dotées de moyens, à mettre en place et des protocoles clairs et précis à mettre en œuvre lorsqu’une situation à risque est détectée.

En amont du contrôle, sont soulignés le manque d’informations et l’absence de circuit clairement identifié des informations détenues dans nos services en interne mais aussi en externe dans d’autres administrations ou organismes. Au-delà de la signature de protocoles nationaux voire locaux, il faut très concrètement savoir où rechercher, qui contacter et à qui donner l’information, tout cela dans un laps de temps de plus en plus réduit par la pression accrue du cadencement et des objectifs à remplir. La collecte d’informations ne saurait peser sur le seul vérificateur au moment où il rédige son avis de vérification. Détenir la bonne information au bon moment peut paraître évident mais la mise en œuvre semble bien plus complexe, notamment au regard de nos services locaux destructurés, d’un maillage territorial en perdition et d’une chaîne du contrôle fiscal totalement démantelée. Comment faire circuler les informations à propos d’une société, par exemple, quand cette dernière est gérée par un SIE, une antenne extra-départementale et un CCPro ? Comme déjà par le passé, sont évoquées certaines mesures comme l’accès au fichier TAJ ou le recours à des plaques d’immatriculation. Il vous appartient aujourd’hui de nous dire clairement si ces mesures sont réalisables et dans quelles conditions. Si votre réponse est négative, soyez transparents et donnez-nous les raisons objectives.

En matière de procédure, une modification de l’article L13 du LPF est nécessaire afin de permettre à l’administration fiscale d’imposer le lieu de vérification et les modalités d’échange avec le contribuable. Solidaires Finances Publiques rappelle néanmoins que cette possibilité offerte ne doit pas devenir la règle et insiste sur la nécessité d’un contrôle fiscal externe effectué au sein de l’entreprise. Quant à l’avis de vérification, il doit être réécrit. Il est indispensable de rappeler en priorité que le contrôle fiscal est une mission légitime et que le vérificateur est un agent de l’État en charge d’une mission de service public au service de l’intérêt général. Sans ce rappel, c’est la puissance publique qui est fragilisée.

En conclusion, s’il est avéré que certaines des mesures nécessaires et utiles à mettre en place ne relèvent pas de la seule DGFiP, il lui appartient néanmoins de les obtenir coûte que coûte. A défaut, elle engage sa responsabilité à l’égard des agents et des agentes et ne pourra arguer qu’elle ne savait pas.

Quant aux mesures qui relèvent de sa seule responsabilité, il serait totalement incompréhensible et incompris qu’elles ne soient pas rapidement mises en place.

Enfin, nous demandons qu’à l’issue de ce groupe de travail, soit mis en place un calendrier d’application des mesures et d’ores et déjà un groupe de travail de point d’étape.