Les atermoiements sur le prélèvement à la source atteignent leur paroxysme. Après plusieurs jours de « débats » entre Bercy et l'Elysée, une décision devrait être rapidement rendue. Quel qu'il soit, ce choix politique aura des conséquences.
A ce stade, sans revenir sur l'ensemble des enjeux, il importe donc de rappeler les éléments suivants.
- Le prélèvement à la source est un changement majeur du système de collecte de l'impôt sur le revenu, beaucoup plus complexe que la simplification avancée. Un choc culturel avant tout. Notre organisation n'a eu de cesse d'alerter l'opinion, la presse et les pouvoirs publics là-dessus (notre « Livre vert » et nos expressions publiques en témoignent).
- De très nombreux travaux ont été menés et ont largement documenté : le Président de la République et le gouvernement ne peuvent dire qu'ils n'étaient pas informés de l'ensemble des enjeux ni des risques identifiés dans le rapport de l'inspection générale des finances de 2017. L'ancien Ministre de l'économie Emmanuel Macron connaissait d'ailleurs parfaitement la position et les arguments de fond de notre organisation mais aussi ceux, similaires, de nombreux économistes, fiscalistes et hauts fonctionnaires de Bercy...
- Nul ne peut prévoir les conséquences de ce changement sur les comportements des contribuables : adopteraient-ils spontanément et naturellement ce nouveau système ? Modéreront-ils, et pour quelle durée, leur consommation au risque de grever une croissance moins forte que prévu ? Rejetteront-ils le prélèvement à la source lorsqu'ils s'apercevront qu'il n'est pas aussi simple qu'ils le croyaient ? Il n'existe aucune certitude sur le niveau de ces différents risques.
- Nul ne peut prévoir les conséquences, à court et à long terme, du prélèvement à la source sur le niveau des rentrées fiscales : les optimistes estiment qu'il sera bon voire meilleur, les prudents rappellent qu'il sera difficile de faire mieux qu'actuellement et qu'au contraire, une baisse est possible comme la Cour des comptes elle-même l'a d'ailleurs relevé dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2018 (annexe 7).
- Nul ne peut savoir avec certitude si tous les acteurs intervenant à un moment ou à un autre sur le prélèvement à la source sont réellement prêts et que tout risque de « bug » est écarté. En la matière, tout ne dépend pas de « Bercy » puisque d'autres acteurs, très diversifiés (grandes entreprises, PME, caisses de retraite, etc) doivent intervenir.
- Depuis 2015, les agents de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) ont mené un travail colossal dans des délais contraints sur un sujet très complexe, tant au sein des services de la Direction générale (conception technique, juridique, fiscale...) que dans les services déconcentrés pour se former et renseigner les contribuables.
- Ceux-ci ont fortement sollicité les agents des Finances publiques ces jours-ci pour avoir des précisions, au moment où la DGFiP lançait sa campagne de communication. Ce sont eux qui gèrent et subissent au quotidien les conséquences de ce psychodrame... Ils n'en sont nullement les responsables.
Le syndicat Solidaires Finances Publiques regrette que le prélèvement à la source ait été engagé et tient à rappeler ces différents éléments au moment où un choix, bien tardif, va être annoncé. Le chef de l'Etat et le gouvernement sont au pied du mur, il s'annonce plus haut que prévu.