Le Ministre de l’action et des comptes publics a annoncé vouloir réformer le système des « niches fiscales », soit en diminuant le plafond actuellement applicable, soit en les conditionnant aux ressources du foyer fiscal. Le coût global actuel des « niches » concernées par cette annonce s’élèverait à 14 milliards d’euros.
Sur la forme, une telle annonce n’a pas de quoi surprendre : parler de certaines niches est plus confortable que d’évoquer la critique des mesures fiscales prises par le gouvernement (suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, création du prélèvement forfaitaire unique, baisse de l’impôt sur les sociétés, incertitudes sur l’avenir de la taxe d’habitation et sur l’impact de sa suppression).
Sur le fond, cette déclaration soulève également plusieurs remarques.
Tout d’abord, les « niches » visées ne concernent que l’impôt sur le revenu et ne constituent qu’une petite partie des 474 « niches fiscales » (crédits d’impôt, réductions d’impôt, déductions, régimes dérogatoires) qui mitent les assiettes de différents impôts (notamment l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés) et dont le coût global devrait avoisiner les 98 milliards d‘euros en 2019 selon la loi de finances.
Par ailleurs, les pistes envisagées n’évoquent à aucun moment l’idée de dresser un « bilan » ou d’instaurer une « revue des niches ». Or, vu leur coût, leur complexité et les effets incertains de nombreux dispositifs (en matière de soutien à l’activité économique notamment), il est indispensable d’analyser l’ensemble de ces dispositifs. En effet, l’intérêt d’une telle « revue » est de distinguer les niches justes et efficaces (à conserver) des autres (à réformer voire à supprimer). De la sorte, il serait possible au terme d’un tel processus d’élargir l’assiette de l’impôt sur le revenu et/ou de l’impôt sur les sociétés et de rendre ces impôts plus lisibles, moins complexes et plus justes.
Or, tel n’est pas le cas actuellement. Outre le manque à gagner qu’il crée, l’empilement de dispositifs, surtout lorsqu’il est pratiqué de longue date et bénéficie d’un plafonnement très élevé (contrairement aux « nouveaux » dispositifs de défiscalisation, limités à 10 000 euros par foyer), produit des effets contraires au principe de progressivité de l’impôt sur le revenu. A tel point que le taux réel d’imposition des revenus diminue au-delà de 900 000 euros de revenu fiscal de référence, comme le montrent les données statistiques disponibles…
Au-delà de l’effet d’annonce du ministre, l’essentiel reste donc à faire : car prétendre gérer sérieusement les dépenses publiques impose d’évaluer les « dépenses fiscales », le véritable terme budgétaire des « niches fiscales ».