La CAP nationale concernant le mouvement général des contrôleurs des Finances publiques s'est cloturée le 27 mai 2019.

Liminaire

Monsieur le Président,

Jeudi 9 mai, plus d’une centaine de manifestations ont eu lieu partout en France et 1 agent sur 4 en gréve à la DGFiP.

Les agents de la Direction Générale des Finances Publiques se sont une nouvelle fois mobilisés ce 9 mai dans le cadre de la journée intersyndicale de la Fonction Publique avec une participation des plus élevées de la Fonction Publique d’État. Le projet de loi Fonction Publique a été présenté le 27 mars en Conseil des Ministres après une année de pseudo concertations avec les organisations syndicales. Une cinquantaine de réunions a été organisée autour de 4 grands thèmes : instances de dialogue social, mobilité, recrutement et rémunération. Aucune revendication de fond des organisations syndicales n'a été prise en compte. Le projet de loi qui a été présenté reprend, en pire, ce qui a été présenté aux organisations syndicales au cours de l’année 2018.

Les agents publics se sont ainsi mobilisés pour affirmer leur refus du projet de loi Fonction publique dont l’étude débute en séance le 13 mai à l’Assemblée Nationale.

Si à première vue ce projet de loi concerne les fonctionnaires et agents publics dans sa dimension de gestion des personnels, il concerne aussi l’ensemble de la population puisqu’en s’attaquant au statut général de la Fonction publique, notamment par la généralisation de la contractualisation, il remet en cause l’exercice d’une fonction publique neutre et impartiale au service de l’intérêt général, et permettra en bout de course la destruction des services publics de manière encore plus rapide et simple. Ce texte entre clairement dans le vaste plan de transformation entamé par le Gouvernement : suppressions d’emplois (120 000 prévues sur le quinquennat), réduction de la dépense publique (60 milliards), suppressions, externalisations et privatisations de missions publiques notamment à travers Action Publique 2022. Ce projet est destructeur de la Fonction publique mais est aussi une des pierres angulaires d’une véritable destruction des services publics dans leur ensemble.

Enfin, la destruction des instances de représentations des personnels (CAP vidées de leurs compétences, fusion des CT/CHSCT) empêchera que les agents publics puissent efficacement se défendre et faire valoir leurs droits. Ainsi, dans un communiqué de presse en date du 15 mars 2019, le secrétaire d’État auprès du Ministre de l'Action et des Comptes Publics, écrit que le Gouvernement a accepté plusieurs amendements ayant pour objet de promouvoir un dialogue social de proximité plus qualitatif et vise à offrir aux fonctionnaires qui le souhaitent, la possibilité de se faire assister par un représentant d'une organisation syndicale représentative de leur choix, dans le cadre des recours administratifs prévus par le projet de loi en matière de décisions individuelles de mutation, d'avancement et de promotion au choix.

Le gouvernement doit retirer son projet de loi et changer ses orientations générales notamment en matière de services publics et de fonction publique. Les exigences portées ces derniers mois par le mouvement social ne peuvent avoir pour réponse la destruction de la Fonction publique et la création de « Maisons France Service », pseudo services publics au rabais. Solidaires refuse le projet de société individualiste porté par le gouvernement. Il est indispensable de se battre aujourd’hui pour une Fonction publique en capacité d’exercer ses missions, sans discrimination, sans pression politique ou économique, au plus près de la population dans les territoires, et qui assure à toutes et tous un socle commun, vecteur de cohésion sociale et réducteur d’inégalités.

La DGFiP est particulièrement touchée : aux suppressions d'emplois et aux restructurations de services s'ajouteront des externalisations de missions. Loin de reconquérir les territoires, les projets gouvernementaux éloigneront davantage les services des Finances Publiques de la population. Avec des dégâts humains considérables, tant pour les agents qui seront amenés à travailler plus loin de chez eux, et dans de moins bonnes conditions que pour les usagers, qui verront les services s'éloigner.

Le gouvernement vient une nouvelle fois de montrer la considération qu’il a des personnels et de leurs représentants. Alors qu’il avait promis d’envoyer aux organisations syndicales un courrier retraçant les chantiers qu’il entendait engager, Gérald Darmanin a préféré réserver ses premières annonces à la presse dans une interview du 8 mai (Le Parisien, Aujourd’hui en France). Gérald Darmanin a ainsi annoncé qu’il allait « proposer au Premier Ministre de déplacer des services de la DGFiP, soit environ 3 000 agents, en région et notamment en ruralité ». Très « politique », cette annonce n’a pas de quoi rassurer les agents (il ne s’agit pas de faciliter les mutations vers la province ni de stopper le mouvement de suppressions de services), ni les usagers… En effet, l’orientation profonde du pouvoir demeure : réduire la place de l’action publique. 

A la DGFiP, dans le vaste mécano de concept de « géographie revisitée », nous assisterons donc à un véritable déménagement du territoire :
- des transferts de services de Paris voire de grandes villes vers des territoires ruraux (qui représenteraient donc 3 000 agents environ),
- une poursuite des suppressions de certains services (division par 4 du nombre des implantations et 1 seul "conseiller" par EPCI),
- des partenariats passés avec les Maisons France Service (MFS), nouvelle appellation des maisons de services au public, forme « low cost » de service public dans laquelle la DGFiP ne sera pas présente de façon pérenne,
- des formes d’accueils itinérants…

Le tout, sur fond d’accélération des suppressions d’emplois, de réforme de la Fonction publique et de régression générale des droits sociaux, notamment en matière de règles de gestion. C’est peu de dire que le gouvernement a déclaré la guerre aux fonctionnaires, et particulièrement aux agents (et aux missions) des Finances publiques. Après s'être fait attendre depuis le 26 mars dernier, le courrier de M. Darmanin est enfin arrivé dans les boîtes des organisations syndicales représentatives. Le Ministre, dans sa missive, fixe le cadre de plus en plus restreint de la future DGFiP.

Les objectifs affichés ne relèvent pas d'une primeur puisque le Ministre a d'ores et déjà fait des annonces médiatiques et malheureusement nos analyses se confirment :
- une présence territoriale modifiée et amoindrie,
- des services délocalisés,
- des changements d'orientation et l'externalisation de certaines missions,
- de nouvelles organisations de travail,
- et bien sûr pour accompagner le tout un suivi personnalisé et collectif des agents dans leur mobilité fonctionnelle ou géographique…

Il ne s'agit pas là de spéculation mais bien d'une réalité, celle d'un projet porté politiquement qui aura des conséquences concrètes sans tarder pour les agents et les missions de la DGFiP…
- La présence territoriale de l'administration : avec la « déconcentration de proximité » ou « géographie revisitée », la conceptualisation de M. Darmanin est, du moins officiellement, d'offrir aux concitoyens un service public spécifique et approprié dans les territoires ruraux ou socialement en difficulté. Cela se décline selon le Ministre par une forme rationnelle et non traditionnelle du service humain de proximité avec la densification des accueils de proximité. Ceci passera par le développement de l'accueil sur rendez-vous, des permanences, mobiles et fixes, avec une structure par canton et un accès à moins de 30 minutes, mais la possibilité de transformer les trésoreries en maisons « France Service ». Sur ce premier point, le Ministre confirme les choix déjà effectifs comme l'accueil sur rendez-vous. Il remet en place les permanences dans les collectivités locales qui existaient autrefois quand les effectifs permettaient de les assurer. Quant à la possibilité pour les trésoreries d'accueillir les maisons « France Service », il est tentant de lui répondre : « s'il faut accueillir ces services au plus près de nos concitoyens, cela veut donc dire : maintenons et renforçons le réseau de proximité de la DGFiP et stoppons les fermetures ».
- Sur la délocalisation de certains services, et donc de certains agents, des métropoles vers les territoires ruraux, M. Darmanin confirme son annonce du 8 mai sans donner plus de précisions sur le type de service et le nombre d'agents si ce n'est que cette délocalisation serait rendue possible par le télétravail et le travail à distance.
- Concernant les missions, il annonce la réflexion bien avancée, pour ne pas dire aboutie, du transfert de la mission cadastrale vers l'IGN. L'évolution du contrôle fiscal vers une mission de conseil est confirmée, l'unification du recouvrement fiscal et social est en cours de réflexion, les services de publicité foncière allégés via la dématérialisation des échanges entre les services et les notaires semblent bien engagés. Pour les missions de la gestion publique, il entend poursuivre les expérimentations du compte financier unique et les agences comptables tout en maintenant la séparation ordonnateur-comptable (au risque de se bercer d'illusions…) mais en ayant une réflexion sur la responsabilité de l'ordonnateur et sur la responsabilité personnelle et pécuniaire (RPP) du comptable public. Tiens tiens…
- Enfin, M. Darmanin aborde le volet social qui doit permettre aux agents de s'adapter à ces transformations profondes de notre administration. La partie indemnitaire est mise en avant avec la mise en œuvre de l'indemnisation des mobilités géographiques et la garantie du maintien de la rémunération, un accompagnement en termes de formation professionnelle de haut niveau. Les conditions de travail semblent avoir une attention particulière de la part du Ministre, sur ce sujet il semble que le baromètre social y soit pour quelque chose ! Cette approche nous rappelle d'autres temps : un autre Ministre qui avait lui aussi une ambition libérale pour Bercy, déclarait « il n'y aura pas de perdant dans les réformes » et chaque agent a vu au cours de ces années passées où cette « ambition » nous a menés.

En conclusion, dans cette lettre de cadrage, il n'y a pas de nouveautés même s'il reste à préciser ce que veut dire dans l'esprit du ministre l'accueil de maisons de France service par les trésoreries… Mais une chose reste certaine : seule une mobilisation d'ampleur portera une autre ambition, celle d'une administration de missions, de plein exercice avec un réseau et des moyens renforcés et des conditions de travail et des rémunérations dignes des agents et des missions qu'ils exercent au service de l'intérêt général.
Bien sûr, tout cela se fait dans un cadre de concertation élargie : organisations syndicales, élus et préfets. Les syndicats devront rendre leurs observations dans le délai d'un mois ! Inutile de dire que les nôtres seront très éloignées de celles du gouvernement… mais qu'elles défendront sans relâche les agents et les missions de service public !
Ce n'est pas la situation des effectifs des contrôleurs des Finances publiques qui va améliorer la situation. Après le projet diffusé le 6 mai, il manque 1 894 postes administratifs et plus de 140 postes d'informaticiens. C'est absolument catastrophique !

Ainsi, Solidaires Finances Publiques réitère sa demande à ce que l'ensemble des listes complémentaires des concours A, B et C soit appelées.
Il faut bien avoir également en tête que la situation projetée des effectifs en catégorie C au 31 décembre 2019 affiche un déficit de 2 618 agents !
Et à cela, il est nécessaire de rappeler que plus de 2 000 emplois DGFiP sont supprimés au PLF 2019.
Solidaires Finances Publiques ne peut se satisfaire du déroulé du mouvement de mutation et de 1ere affectation des Contrôleurs des Finances Publiques.
5 076 demandes de mutations et de 1ere affectation ont été examinées contre 6 331 en 2018. Cette diminution conséquente est due aux délais de séjour appliqués pour la 1ere fois aux titulaires affectés au 01/09/2018 ainsi qu'à l'affectation au département créée sur 14 directions.
Solidaires Finances Publiques demande l'abandon du délai de séjour de 2 ans. Un délai de séjour de 1 an permet à chaque agent des Finances Publiques de pouvoir améliorer sa situation personnelle et professionnelle.
Solidaires Finances Publique rappelle que des agents se sont également privés de demander une affectation « tout emploi » sur l'une des 14 directions préfiguratrices. Pour exemple, le département des Bouches-du-Rhône est en solde négatif de 60 contrôleurs des Finances Publiques. La distance kilométrique d'un bout à l'autre du département est importante et cette nouvelle affectation est équivalente pour tout agent à une affectation à la disposition du directeur sur le département. Les agents doivent attendre la CAP locale pour connaître précisément leur affectation.
Solidaires Finances Publiques revendique pour chaque agent de la DGFiP une affectation nationale la plus fine possible.
Seules 4 directions sont concernées par les Affectations d'Office et dites ouvertes. Il s'agit de la Haute-Savoie, de la Seine-Saint-Denis, de l'Isère et du Service Documentation Nationale du Cadastre (A15).
Pourtant certaines directions restent avec un déficit d'effectif important. Pour exemple :
- Alpes-Maritimes : - 38 ;
- Bouches-du-Rhône : - 60 ;
- Haute-Garonne : - 31.

Or des agents sont en attente de mutation. La conséquence est qu'artificiellement le mouvement est bloqué.
Résultat, bien que vous nous ayez précisé que 91 % des agents ayant demandé un rapprochement de conjoint ou familial obtiennent satisfaction, 112 demandes de rapprochement restent en attente sur des départements par ailleurs très largement déficitaires.
Pour exemple la Seine-et-Marne, - 34 B et 7 rapprochements en attente.
Sur le Var, un déficit de 26 B et 9 rapprochements en attente.
Le Pas-de-Calais : 13 rapprochements en attente, déficit de 30 contrôleurs.
L'Ille-et-Vilaine est à - 36 B et 2 rapprochements non effectués.
C'est inacceptable ! Et les situations seront présentées en séance.
Nouveauté d'importance en 2019, les agences comptables. La date limite de dépôt des collectivités ayant fait acte de candidature pour accueillir une agence comptable a été fixée au 31 mars 2019.
Il est extrêmement difficile d'obtenir de la DG des informations et la liste des collectivités ayant candidaté.
Il est utile de rappeler que cela conditionne pour les agents des services concernés l'utilité ou pas d'effectuer une demande de mutation.
Hélas, au vu de l'opacité existante, trop peu d'agents ont eu la possibilité de faire une demande de mutation nationale et vont devoir se contenter d'une demande locale.
Là-aussi c'est inacceptable, d'autant plus qu'au fur et à mesure du temps, nous apprenons que la liste des collectivités grossit.
Sur les postes au choix, les agents se posent des questions. Soit parce qu'ils n'ont pas eu un avis favorable, soit pour savoir pourquoi ils n'ont pas été choisis sur ces postes-là. Nous savons que des agents vous ont écrit sur ce sujet.
Cela nous a occasionné beaucoup de questions en consultation de la part de nos adhérents car nous n'avons pas les éléments permettant de leur répondre !

Pour le mouvement informatique, nous rencontrons les mêmes difficultés, les fichiers transmis ne sont pas simples à lire.
Nous avons eu des difficultés de pointage sur certains établissements pour savoir quelles priorités avaient été traitées.
Vous avez comblé des déficits importants sur certains établissements mais du coup vous n'avez pas respecté des demandes des agents alors qu'il reste des postes vacants.
Nous avons eu du mal à trouver la réalité au milieu de tout cela.

Les directions locales ont déjà écrit aux agents pour remplir les fiches de souhaits ou vœux pour les CAPL.
De notre côté, dans l'espoir de rectifications et cascades pendant cette CAPN, nous aurions souhaité que ces travaux soit faits après le 24 mai, date actuelle de sortie du définitif.
De plus, nous constatons des difficultés récurrentes sur les agents en situation de handicap. Le recrutement important de ces personnels ne pose pas de soucis. Certaines personnes en situation de handicap ont réussi le concours. Mais le suivi administratif et local donne le sentiment que ces agents sont laissés à l'abandon.
Solidaires Finances Publiques souligne qu'il n'y a pas de sujet quant au recrutement mais bien le suivi sur la carrière des agents. Ce suivi n'est pas suffisamment fait et ils rencontrent des difficultés professionnelles mais aussi personnelles, y compris en mutations.
Des agents, se sont vus opposer un refus de codification de priorité handicap sur leur fiche de vœux, y compris pour des agents ayant la carte mobilité inclusion (CMI).
Afin de permettre à la Direction Générale de prendre en compte ces situations suffisamment en amont, Solidaires Finances Publiques demande à ce que les ressources humaines des directions locales, sous l'autorité de la DG, n'interviennent pas pour demander aux agents la suppression du vœu priorité handicap.

Enfin, comment ne pas aborder le sujet de la future situation des contrôleurs stagiaires avec une affectation donnée avant l'entrée en scolarité.
Les fiches de vœux devraient être faites en juin.
De nombreux paramètres sont encore inconnus à ce jour : date exacte de la campagne de saisie des vœux, modalités concernant les externes...
Et une CAP devrait être tenue en septembre à une date inconnue et sur des critères indéfinis.
De nombreuses difficultés sont présentes, y compris pour la DG, d’où notre demande de retrait, voire à défaut de repousser d'un an a minima, ces nouvelles modalités.
Comment allez vous faire un mouvement de 1ère affectation cohérent ?
Au vu du projet diffusé le 6 mai, seulement 3 départements sont ouverts, le déficit d'effectif est réparti sur l'ensemble des directions, des rapprochements en attente sur environ 20 départements et des agents n'ont pas obtenu de mutation au 01/09/2019 alors que des vœux sont présents.
En conséquence, nous craignons que la situation de l'année dernière concernant l'affectation des A stagiaires se reproduise, et que des postes refusés aux titulaires soient proposés aux stagiaires dans le non-sens le plus total.
Au vu de la taille de la promotion de contrôleurs stagiaires 2019-2020, vous n'allez pas mettre tout le monde dans le 93 !
Il est certain que cela créera de nombreuses discussions en interne quand des agents verront des affectations de stagiaires sur des postes qui sont refusés au mouvement général du 1/9/19.

Enfin, comment conclure sans parler du calendrier. Au fur et à mesure des années, la DG a restreint le travail engagé de cette CAP de mutation.
Ainsi, nous avons en 2019 uniquement 2 jours de consultation et 4,5 jours de CAP. Vous envisagez sur une seule journée de répondre aux situations évoquées lors de cette séance et, que l'on puisse à nouveau pouvoir comprendre, le vendredi 24 mai au matin pourquoi la situation d'agents n'est pas prise en compte. Pour rappel, une CAP d'accueil en détachement prévue les 27 et 28 mai a été annulée tardivement et la DG aurait pu décaler la sortie du mouvement définitif afin d'améliorer la qualité des travaux. Nous avons le sentiment d'être pris pour des andouilles.
Pour mémoire la CAP A suspend ses travaux plus longtemps, à une journée de consultation de suites et une CAP de suite d'une journée complète !
Quelle conclusion en tirer ?
C'est une certitude : pas de suites.
Et dans l'avenir on préférera régler les situations en off au profit d'un arbitrage programmé.
Ce que vous faites est écœurant.