L'administration a organisé, le 4 décembre 2024, un groupe de travail intitulé "Parcours de carrière A+ et A" qui pouvait laisser espérer l'ouverture de discussions sur une amélioration des carrières des agents de la DGFiP qui aurait commencé par les A. La réception DU document a refroidi notre enthousiasme puisqu'il ne s'agissait pas d'une évolution des carrières mais d'un échange suite aux remontées des "rencontres parcours de carrière des cadres" organisées par la DG. Si les demandes et attentes des cadres ont été identifiées par l'administration, les réponses sont bien insuffisantes !
Liminaire
Demain, 5 décembre, une très large intersyndicale de la Fonction publique et l’ensemble des organisations syndicales de la DGFiP appellent à une journée de grève, de rassemblements et de manifestations sur l’ensemble du territoire.
Les orientations gouvernementales tendent à faire du fonctionnaire, le responsable de tous les maux et à lui infliger de nouvelles mesures intolérables.
Au-delà des coupes budgétaires et des suppressions d’emplois impactant notre ministère (35 000 en un peu plus de 15 ans dont 30 000 à la DGFiP), s’ajoute une offensive contre la Fonction Publique, érigée en coupable idéale.
Appuyée sur des constats erronés et à tout le moins tronqués, la manœuvre est particulièrement détestable, car elle touche le registre de la santé et de la prise en charge de la maladie. Mélangeant absentéisme et maladie, le gouvernement veut imposer notamment le déremboursement partiel des arrêts maladie, l‘ajout de deux nouveaux jours de carence et la suppression de la GIPA pour 2024 et 2025.
Tout cela s’appuie sur des comparaisons public / privé fallacieuses.
A l’heure où les périls et les défis sont nombreux, l’heure ne devrait pas être à la division et moins que jamais au fait de dresser un salarié contre un autre.
Derrière un pseudo-message d’équité, c’est bien une saignée sans précédent que le gouvernement souhaite infliger aux agents publics.
Concernant le groupe de travail de ce jour, l’administration a produit une fiche présentant les travaux des rencontres « parcours de carrière » des cadres.
Avant d’entrer dans le détail de la fiche, Solidaires Finances Publiques souhaite évoquer les bouleversements majeurs intervenus ces dernières années en matière de gestion des ressources humaines et en particulier ceux de la catégorie A : grades A+ et inspecteur.
Tout est allé très vite, très très vite !
Depuis des décennies, les cadres comptables et administratifs étaient affectés, comme l’ensemble des personnels, dans le cadre de mouvements semestriels ou annuels, par application de règles connues de tous. Ce n’était peut-être pas la panacée mais le système était globalement compris, transparent pour les cadres et les services fonctionnaient.
Or, sous un vocable alléchant « fluidifier les mobilités et déconcentrer les recrutements », la Direction générale a œuvré pour une déréglementation totale des affectations des cadres supérieurs, étendue progressivement aux cadres A (inspecteurs), puis B et C.
On notera successivement :
- un recrutement au choix des comptables sur les postes C1, généralisé ensuite aux comptables des catégories C2 et C3 ;
- depuis cette année et malgré l’opposition des représentants des personnels, suppression de tout mouvement comptable et recrutement exclusivement au fil de l’eau (postes comptables C1, C2 et C3 et emplois de chefs de service administratif (CSA)) ;
- pour les postes administratifs, alors que seules les vacances qui s’ouvraient en cascade dans les directions territoriales étaient (encore !) pourvues selon les règles de gestion (ancienneté), suppression à compter de 2025 de tout mouvement et généralisation du recrutement au choix au fil de l’eau ;
- pour les inspecteurs et inspectrices : mouvement local entièrement au choix.
Les remontées que nous avons sont les suivantes :
- le recrutement au fil de l’eau : c’est un nombre de postes réduit à chaque appel qui ne permet pas d’avoir une vue d’ensemble des postes vacants d’où une contrainte pour postuler ;
- le recrutement au choix : c’est une absence totale de visibilité et une impossibilité de se projeter dans le futur ; c’est d’autant plus le cas pour les lauréats IDIV en attente de promotion. Que deviendront les cadres non choisis qui arrivent au terme du vivier ?
- le recrutement au choix : c’est un moyen de neutraliser les priorités légales et d’écarter la prise en compte des situations personnelles ;
- le recrutement au choix est chronophage : rédaction d’un CV et d’une lettre de motivation adaptée à chaque poste ;
- le recrutement au choix favorise un entre-soi ;
- le recrutement au choix empêche la mobilité fonctionnelle avec le risque d’être maintenu dans un métier ;
- et contrairement aux ambitions de la DG, les cadres non retenus ne peuvent pas « rebondir » au vu des réponses types faites par les directions locales.
Avec de telles contraintes et une telle opacité, les collègues hésitent à postuler.
Contrairement au but recherché par l’administration, ce mode de recrutement ne permet pas une fluidification mais s’avère être un frein à la mobilité. Il n’y a d’ailleurs, jamais eu autant de postes vacants depuis l’extension de ce mode de recrutement (y compris sur des postes comptables HEB !).
Face à un tel constat, il n’est pas surprenant que les cadres, confrontés à de tels bouleversements, se sentent lâchés dans la nature et expriment un besoin d’accompagnement.
Et c’est donc dans ce cadre-là, celui du recrutement au choix et au fil de l’eau, que l’administration présente, dans sa fiche, ses travaux sur les parcours de carrière qui ne résolvent en rien ces sujets.
En résumé, la DG a parachevé son œuvre de déréglementation des mouvements A+ :
- suppression de tout mouvement au profit d’un recrutement au fil de l’eau,
- suppression de toute règle de gestion au profit d’un recrutement au choix,
- en mutation comme en promotion,
- et pour tout poste, administratif ou comptable.
Solidaires Finances Publiques combat ces dérives et exige l’organisation de mouvements avec publication préalable d’une note de service comportant des règles de gestion claires, transparentes et contrôlables.
S'agissant des éléments contenus dans la fiche:
Vous reconnaissez dans ce document de GT la souffrance des cadres que nous dénonçons depuis des années !
- des cadres sont dans une position parfois « attentiste ». Qu’entendez-vous par ce terme quelque peu péjoratif ?
- ils ont un besoin d’accompagnement notamment dans le cadre du recrutement au choix ;
- le sentiment de perte de repères voire de filiation est partagé ;
- ils ressentent une différence de traitement entre les grades qui impacte leur motivation : pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce point ?
- les cadres ont des attentes de clarification sur la valorisation de la mobilité externe dans leurs parcours.
Pour répondre à ces demandes de transparence et de repères en termes de mobilité géographique et fonctionnelle, vous procédez :
- à la refonte d’Ulysse par la création d’un espace « Parcours, mobilité et carrière ».
Pour Solidaires Finances Publiques ce nouvel espace ne doit pas être un simple lifting d’Ulysse mais apporter réellement plus d’informations tant sur les déroulés de carrière que sur la mobilité. Pour ce faire, il est nécessaire, outre la cartographie des emplois et des postes sur tout le territoire en temps réel, de publier les affectations au moins une fois par mois.
- à des flashs mobilité hebdomadaires adressés directement aux 9 000 cadres A+, permettant un accès facilité aux fiches de postes publiés sur PASSERELLES (postes offerts à la DGFiP et ouverts à l’extérieur).
Pour notre organisation, c’est une évolution qui donne plus de transparence mais c’est surtout une tentative pour corriger les défauts de Passerelles, qui reste un outil interministériel, non adapté aux métiers et aux grades de la DGFiP.
Sur le besoin de perspectives professionnelles et la valorisation de l’expertise
Lors de la consultation, conformément à ce qu'on vous dit et répête depuis bien longtemps, les cadres de la DGFiP ont exprimé leur fort attachement à la promotion sociale ainsi qu’à des perspectives de carrière diversifiées et riches.
L’administration envisage :
- une simplification du concours professionnel d’inspecteur principal. Pouvez-vous nous apporter des précisions ?
- une réflexion sur les modalités de valorisation de l’expertise des AFIPA pour élargir leurs perspectives professionnelles. Pourquoi limiter celles-ci aux seuls AFIPA ? Quelle finalité ? Pouvez-vous nous en dire plus ?
Concernant le sujet de l’expertise (par opposition à la filière chef de service), Solidaires Finances Publiques réitère son revendicatif de développer fortement la filière expertise pour des raisons à la fois fonctionnelles (technicité des missions, besoin de soutien technique des personnels…) et pour répondre aux attentes d’évolution de carrière des cadres A ne souhaitant pas devenir chefs de service.
Vous mettez en vant la valorisation des filières longues et courtes à travers le nombre de postes offerts aux examens professionnels d’IP et d’AFiPA.
Pour Solidaires Finances Publiques toutes les voies de recrutement doivent être optimisées, et ce, pour tous les grades.
Sur le besoin d’accompagnement tout au long de la carrière des cadres
Préparation nationale aux promotions internes, offre d’accompagnement via les CMC-RM, dispositif d’immersion des cadres dans les services du réseau (…) sont des mesures qui vont dans le bon sens mais qui devraient être offerts à tous nos collègues et pas uniquement aux A et A+.
Concernant la mobilité externe, Solidaires Finances Publiques attire de nouveau l’attention de la centrale sur le sentiment des cadres qui font ce choix, de ne plus appartenir à part entière à la communauté de la DGFiP, bien qu'ils aient à cœur d'en porter les valeurs et l'expertise. Le plus souvent, les rares contacts sont soit à leur initiative, avec des difficultés à rencontrer le bon interlocuteur, soit dans le cadre de la transmission du compte rendu annuel d'entretien professionnel. Quant à la réintégration, force est de constater une absence d’accompagnement adapté.
Pour développer la mobilité externe, l’administration se doit d’apporter des réponses à ces attentes.
Compte-rendu
Le recrutement au choix et au fil de l’eau des cadres A+ ainsi que les affectations locales au choix des inspecteurs ont donné lieu à des échanges nourris entre les représentants des personnels et ceux de l’administration.
Solidaires Finances Publiques et les autres organisations syndicales présentes ont démontré les conséquences néfastes de la généralisation totale d’un tel système pour les personnes qui candidatent mais aussi pour les services.
La Direction générale dit entendre les remarques, ne nie pas les problèmes, mais reste convaincue qu’il n’y a pas meilleure méthode pour « mettre la bonne personne sur la bonne chaise ».
Pour elle, les organisations syndicales voient le verre à moitié vide, et elle, le verre à moitié plein. Elle souhaite que les cadres soient acteurs de leur parcours professionnel. Mais encore faudrait-il le pouvoir puisque toutes les réformes laissent la main mise aux recruteurs !
Suite à nos questions générales, la DG a apporté les éléments de réponses suivants.
- Face à la déconcentration des recrutements, la centrale sera-t-elle encore en capacité de régler des situations individuelles difficiles, s’est interrogé Solidaires Finances Publiques ?
La DG se veut rassurante en certifiant qu’une soupape de sécurité existe et existera toujours et qu’elle peut régler - hors règles et à la marge - des situations difficiles.
Solidaires Finances Publiques rappelle qu’en cas de situation personnelle difficile (problèmes familiaux, de santé, de perte de poste suite à restructuration de son service…), il est nécessaire de nous contacter dès le dépôt de la demande pour qu’on puisse intervenir le plus tôt possible. - Le recrutement au choix : conséquence pour les lauréats IDIV en attente de promotion. Que deviendront les cadres non choisis qui arrivent au terme du vivier ?
La DG estime que le recrutement au fil de l’eau n’est pas un obstacle pour prendre un poste et que le nombre de lauréats, amenés à sortir du vivier, n’augmentera pas. Même si le nombre de collègues concernés resterait faible, nous avons quand même demandé de prolonger la durée du vivier pour éviter la perte de la promotion de ces lauréats, mais la DG refuse. Les collègues concernés auront donc à repasser la sélection alors qu’ils l’avaient réussie antérieurement. - La filiarisation, le risque d’être bloqué dans un métier ? C’est un risque reconnaît-elle et elle va mobiliser les recruteurs pour le combattre..
- L’entre soi ? Pour la DG, cela peut arriver mais demeure très limité ! Pourtant, nombre de promotions se fait dans la même direction ou interrégion. Cela peut arranger les collègues qui ne veulent ou ne peuvent partir loin mais si on veut changer de direction, et même d’interrégion, l’exercice se corse.
- Le caractère chronophage du recrutement au choix : la DG ne semble pas voir le problème : le CV est réutilisable. Quant aux lettres de motivation, l’intelligence artificielle fait des adeptes à la DG puisqu’il nous a été répondu qu’avec internet, en 2 mn, on a une lettre de motivation (sic). Pourtant le problème n’est pas là mais dans l’adaptation de la lettre à chaque poste.
- Les cadres non retenus ne peuvent pas « rebondir » au vu des réponses types faites par les directions locales : la DG reconnaît un point de vigilance sur ce sujet. Pourtant, ce sujet est dénoncé depuis l’arrivée des postes au choix mais on dirait que les recruteurs ont du mal à comprendre la nécessité d’un retour clair aux candidats. Dire seulement qu’il y avait un candidat encore meilleur mais sans préciser quel point aurait pu être meilleur ne permet pas de savoir comment progresser....
Quelques réponses suite à l’examen de la fiche transmise pour ce groupe de travail:
La consultation des cadres
- Des cadres sont dans une position parfois « attentiste ».
Pour la DG, rien de péjoratif, les cadres sont acculturés au modèle d’avant d’où une position d’attente et donc un accompagnement à développer.
- Ils ressentent une différence de traitement entre les grades qui impacte leur motivation.
C’est le reflet du vécu difficile des situations transitoires : IP sur poste AFIPA ; IDIV sur poste IP. Remontées de situations hétéroclites : certains cadres y ont trouvé un intérêt, d’autres ont ressenti un problème de positionnement.
Sur la demande d'une cartographie des emplois et des postes en temps réel : la DG en a rêvé mais pour elle la réalisation serait trop compliquée.
Sur la publication sur Ulysse à date fixe (à priori, par trimestre) des affectations : la DG est d’accord et va examiner la faisabilité de la chose. Nous continuerons à porter le sujet, la publication au fil de l’eau sur BOFiP ne répond pas à la demande de transparence.
Sur les multiples candidatures sur PASSERELLES : quelle règle quand un candidat est retenu sur plusieurs postes ?
Avec Passerelles, il n’y a pas de classement des demandes, c’est donc le candidat qui a le choix s’il est retenu sur plusieurs postes. Néanmoins, la DG reconnaît qu’il est nécessaire de fixer une règle notamment sur la gestion des délais.
Solidaires Finances Publiques a demandé un cadrage concernant les dates de publications des offres. Il nous paraît nécessaire que les emplois à pourvoir à une même date soient publiés en même temps afin d’éviter aux cadres de se poser des questions sur un éventuel autre poste offert correspondant plus à leurs attentes.
L’administration a répondu que l’exercice n’est pas possible puisqu’il arrive que des postes se libèrent au dernier moment.
Pourtant une règle aurait pu être préconisée quand bien même des exceptions persisteraient à la marge.
Le besoin de perspectives professionnelles et la valorisation de l’expertise
Concernant la simplification du concours professionnel d’inspecteur principal.
Cela concernerait une éventuelle fusion des deux épreuves orales et une ouverture sur des sujets plus généralistes dans les épreuves écrites, suivant la même logique que la réforme du concours d’inspecteur externe. La mise en application serait en 2026 pour les affectations de 2027.
Solidaires Finances Publiques a réitéré sa demande d’une épreuve informatique : le sujet fera partie de la réflexion sur la filière informatique.
Concernant la réflexion sur les modalités de valorisation de l’expertise des AFIPA pour élargir leurs perspectives professionnelles, la réponse de la DG a été particulièrement évasive.
« Seraient visés certains métiers en tension, ça ne concernerait pas les AFIPA à l’échelon spécial ou en détachement CSC / CSA, ce serait un petit boost indemnitaire » !
Face à autant d’imprécisions, Solidaires Finances Publiques a demandé que cette réflexion soit globale et non limitée aux seuls AFIPA.
De plus, Solidaires Finances Publiques a précisé que ce sujet était à distinguer de la filière expertise pour laquelle nous revendiquons un réel développement.
Concernant la mobilité externe, la DG a confirmé la nécessité de renforcer l’accompagnement des cadres en mobilité externe.
En conclusion, Solidaires Finances Publiques rappelle qu’il revendique une linéarité de carrière pour chaque cadre selon les modalités suivantes :
- pour AFIPA : HEA 3 : indice brut 1216, indice majoré 968,
- pour IP : HEA 1 : indice brut 1100, indice majoré 886,
- pour IDIV HC : indice brut 1015, indice majoré 826.
- la création en nombre suffisant d’emplois de CSC administratifs pour des raisons fonctionnelles et pour tenir compte de la réduction de moitié du nombre de postes comptables (NRP).
- la linéarité au sein du grade d’IDIV.
- le développement de la filière expertise.