À ce jour, la Direction générale des Finances publiques dispose de deux sites d’hébergement de serveurs en Ile-de-France. Un site est déjà géré en totalité par une société de service externe (SPS), l’autre par des fonctionnaires aidés par des prestataires. Selon nos informations, la Direction générale envisage de généraliser l’intégralité de la mission d’hébergement à une société de service externe et ceci sur les deux sites.

Plusieurs arguments sont portés par la direction générale pour argumenter cette décision :

– Les bonnes pratiques de l’hébergement informatique ne sont pas partagées et mutualisées entre les équipes qui gèrent les différentes salles. Elles requièrent des formations et une expérience non identifiée parmi les personnels DGFiP.

– La protection du statut de la fonction publique et la gestion des ressources humaines ne sont pas compatibles avec les conséquences que peuvent avoir des Enquêtes Administratives de Sécurité sur les personnels accédant aux salles d’hébergements de manière autonome.

– Une permanence quotidienne sur une amplitude horaire suffisamment large est nécessaire au bon fonctionnement de l’équipe et à la sécurisation de l’hébergement.

Ces points surprennent à plus d’un titre.

— Dire et affirmer que les agents de la DGFiP ne sont pas en capacité ou n’ont pas la formation ou la technicité nécessaire à la gestion des salles serveurs n’est ni sérieux, ni crédible et clairement fallacieux. De plus, et au contraire de ce que sous-tend la DG dans son argumentaire, les prestataires ont largement emprunté les méthodes de travail mises en place par les agents fonctionnaires dans leurs tâches.

— Porter l’argument que le statut de la fonction publique ne permet pas de mener de façon satisfaisante une enquête administrative de sécurité est encore très singulier. Rappelons que lors de leur prise de poste, l’administration vérifie déjà le casier judiciaire des candidats admissibles. De plus, on ne voit pas très bien ce qui empêcherait l’administration de demander une enquête administrative pour un fonctionnaire affecté dans un service sensible[1]. Que vient faire ainsi la référence au statut de la fonction publique ? Rappelons que dans un premier temps « l’enquête » en question se borne à regarder dans plusieurs fichiers (par exemple les fichiers « traitement d’antécédents judiciaires » (TAJ), « fichier des personnes recherchées » (FPR), fichier des « enquêtes administratives liées à la sécurité publique » (EASP)…) si la personne concernée est absente des fichiers, l’enquête s’arrête là. Cette procédure est donc parfaitement compatible avec le fait d’être fonctionnaire. De plus, et si par malheur, l’agent prédestiné à travailler dans ces infrastructures était inscrit dans un de ces fichiers, rien n’empêcherait l’administration d’affecter un autre agent de l’ESI.

— Quant à la question portant sur la présence et l’amplitude horaire, elle est, là aussi, assez étrange. Que l’on soit fonctionnaire ou salarié du privé, on est limité à la fois sur le temps de travail quotidien et hebdomadaire. De plus, le principe des astreintes existe toujours en cas d’urgence. Que va apporter en plus la prestation de service ?

De manière globale, alors que le nouveau cadre d’objectifs et de moyens fait un focus particulier sur la volonté de la DGFiP de réinternaliser les tâches des services informatiques, il est contradictoire, de voir prise une décision de privatisation totale de nos deux principaux centres d’hébergement. Rappelons encore une fois que Solidaires Finances Publiques a toujours dénoncé la gestion du SPS par une société de services et porte avec constante une réintégration et une ré-internalisation de la totalité de nos missions y compris donc de la mission d’hébergement !

À ce titre, et comme nous l’avons vu, les différents arguments de l’administration ne tiennent pas et sont incompréhensibles. Ou trop évidente au contraire ? La vraie raison ne serait-elle pas que l’administration veut se prémunir contre toute action de blocages ou de mobilisation des agents ? Pour nous, la question mérite d’être posée…

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[1] Code de la sécurité intérieur - Article L114-1- Modifié par LOI n°2023-703 du 1er août 2023

I. – Les décisions administratives de recrutement, d'affectation, de titularisation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation, prévues par des dispositions législatives ou réglementaires, concernant soit les emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'Etat, soit les emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense, soit les emplois privés ou activités privées réglementées relevant des domaines des jeux, paris et courses, soit l'accès à des zones protégées en raison de l'activité qui s'y exerce, soit l'utilisation de matériels ou produits présentant un caractère dangereux, peuvent être précédées d'enquêtes administratives destinées à vérifier que le comportement des personnes physiques ou morales intéressées n'est pas incompatible avec l'exercice des fonctions ou des missions envisagées.