La DGFiP, par une note de service en date du 13 janvier 2020, vient de dévoiler les premiers éléments concernant la mise en œuvre de la déclaration automatique, ex-déclaration tacite. Rappelons que cette réforme avait été annoncée par le Ministre le printemps dernier.
Résumons tout d’abord les principaux points de cette nouvelle « simplification »…
Les contribuables éligibles à cette déclaration automatique devront entrer dans les catégories suivantes :
- avoir été taxés au titre des revenus 2018, sur la base de codes revenus exclusivement pré-remplissables (sans aucun revenu foncier, BIC, BNC, BA ni pension alimentaire notamment) mais ayant éventuellement servi des rubriques relatives aux charges ouvrant droit à RI/CI ;
- ne pas avoir signalé de changement de situation de famille ou de naissance, et n’ayant pas créé d’acompte via « GestPas » durant l’année 2019 ;
- ne pas avoir signalé de changement d’adresse durant l’année 2019.
Seront également éligibles les contribuables :
- ayant déposé une déclaration 2018 ne comportant aucun revenu ;
- ayant modifié en totalité ou partiellement leurs revenus pré-remplis 2018 (pensions, salaires, RCM).
Les contribuables qui seront automatiquement exclus :
- les foyers dont les revenus nécessitent un retraitement particulier par l’usager (assistants maternels ou familiaux, journalistes, articles 62) ;
- les foyers ayant déclaré des rentes viagères à titre onéreux (RVTO), ces revenus générant des prélèvements sociaux ;
- les contribuables détenteurs d'un compte bancaire à l'étranger, les contribuables relevant de la DINR, les résidents à Saint-Martin et Saint-Barthélémy ainsi que les usagers résidant à Monaco et relevant du SIP de Menton.
On le voit, le panel est particulièrement large. En effet, la Direction Générale englobe l’ensemble des contribuables dont elle a la « raisonnable assurance » et pour lesquels il est « probable » que les informations pré-remplies sont exhaustives !
Pour faire face au contentieux prévisible (!), la télé correction va être élargie aux usagers ayant utilisé leur faculté de dispense de dépôt, et également, à l’étude, pour les contribuables ayant déposé papier.
Ce projet pris au détour d’une simple modification de l’article 171 du CGI porte en lui bien plus qu’il n’y parait. Il sous-entend une nouvelle vision de l’impôt sur le revenu et plus globalement de la fiscalité. Ainsi sous couvert de simplification de la vie des usagers, nous assistons à une évolution qui provoquera en définitive des situations complexes, tout comme en matière de prélèvement à la source. En effet, le discours de la simplification envoie au final le signal d’une certaine déresponsabilisation. Or, le prélèvement à la source nécessite un suivi plus exigeant qu’avec l’ancien système du fait du caractère « contemporain » de l’impôt. S’agissant de la déclaration des revenus, l’effet pervers est double : les foyers (par exemple les retraités) dont la situation n’évolue pas seront déconnectés du système déclaratif normal, tandis que d’autres, dont la situation évoluerait, pourraient se retrouver obligés d’effectuer une déclaration à l’avenir après en avoir été dispensés… Comme simplification, on aura vu mieux ! Une telle mesure affaiblirait clairement notre système déclaratif, et ce alors que, dans une démocratie, le lien entre le citoyen et la collectivité s’effectue par l’impôt, notamment par l’impôt direct et justement par ce système déclaratif. Tout cela affaiblit le consentement à l’impôt et pourrait préparer le terrain à la réforme rêvée des conservateurs dits libéraux : en finir avec l’impôt progressif sur le revenu.
Sur les aspects purement pratiques, de très nombreuses questions se font également jour ! Comment se feront (ou ne se feront pas) les contrôles a posteriori, et avec quels moyens humains ? Comment se géreront les phases de contentieux ? Les modifications de taux de PAS ? Les doublons en cas de dépôts papier dans un autre centre ?
Tout ceci risque de poser des problèmes inextricables aux services des particuliers, problèmes qui risquent d’être bien supérieurs aux avantages officiellement attendus par l’administration.
Solidaires Finances Publiques fera bien sûr remonter toutes ces questions lors du prochain groupe de travail sur le sujet. Mais encore une fois, nous déplorons qu’une décision politique, irréfléchie, rapide, impacte lourdement à la fois les agents des Finances publiques et les liens sociétaux.